Guide Gothenburg : Histoire

Statue de Gustave II Adolphe.
Statue de Gustave II Adolphe.
Chronologie

8000 avant J.-C. Premières traces d'habitants dans la région de Göteborg.

XIe siècle. Des cités sont construites à l'emplacement de l'actuelle Göteborg, mais elles sont toutes successivement détruites par les assaillants danois.

XIIe siècle. La région de Göteborg devient un carrefour commercial important.

Du XIIIe siècle au début du XVIIe siècle. La région est convoitée sans qu'aucune ville significative n'y soit construite.

Le Roi Gustav Vasa (1496-1560) essaie ainsi de construire une nouvelle ville près de la forteresse Älvsborg et du fleuve Göta älv, en vain.

1600-1611. C'est finalement Charles IX qui fonde une ville, du nom de Göteborg, sur l'île d'Hisingen avec l'aide des Hollandais qui bénéficient de nombreux avantages en échange. Mais la ville, située sur une île est peu protégée et elle est attaquée puis détruite par les Danois en 1611.

1612-1619. Le Danemark prend possession de la forteresse Älvsborg, un site stratégique dans les guerres territoriales.

1619. Le fort Gamla Älvsborg est cédé à la Suède par les Danois.

1621. Fondation de Göteborg par le roi Gustav II Adolf. C'est le premier territoire suédois de la côte ouest de la Suède alors sous domination danoise

1630-1750. Des commerçants hollandais s'installent à Göteborg, attirés par les conditions favorables au commerce. Des architectes et ingénieurs hollandais construisent le centre historique de la ville, Inom Vallgraven.

XVIIIe siècle. Âge d'or du commerce à Göteborg devenue siège de la Compagnie suédoise des Indes orientales.

XIXe siècle. L'industrie de la construction de bateaux devient le moteur économique de la ville.

La ville s'agrandit, perd ses murailles, qui sont remplacées par de grands parcs, et devient une ville industrielle à partir de la fin du XIXe siècle.

1907. Création de SKF, entreprise de roulement à billes.

1927. Création de l'entreprise Volvo. Première voiture fabriquée la même année.

Début des années 1980. Faillite de l'industrie des chantiers navals de Göteborg.

1999. Volvo est rachetée par l'entreprise américaine Ford.

2010. Ford vend l'ancienne branche automobile de Volvo au Chinois Geely.

2012. Göteborg, capitale gastronomique de la Suède.

Préhistoire

L'étude minutieuse des couches argileuses déposées chaque année par les glaces a permis aux géologues suédois de situer à 12 000 ans environ avant J.-C. le début du processus de la fonte des glaces en Suède. Le premier habitat humain connu, dans le Sud du pays, remonte à environ 10 000 ans avant J.-C. Au fur et à mesure de la fonte, les premiers chasseurs ont progressé vers le nord ; au cours de la période comprise entre 8000 et 6000 ans avant J.-C., l'ensemble du territoire commença à se peupler de tribus qui vivaient de la chasse et de la pêche. On sait aussi que ces peuplades domestiquèrent les animaux et introduisirent les premières cultures. Les premiers cultivateurs sédentaires apparurent vers 300 avant J.-C.

A cet âge de la pierre succéda, à partir de 1800 avant J.-C. et jusqu'à 500 avant notre ère, l'âge du bronze, qui doit son nom aux armes et aux objets de culte de bronze et de cuivre caractéristiques de cette époque. Des rochers sculptés, illustrant les rites de la fécondité ou montrant des armadas de bateaux, semblent indiquer un niveau élevé de civilisation en même temps qu'un tout début de maîtrise de l'usage du fer. Au cours du deuxième âge du fer, de 500 avant J.-C. jusqu'à 400 après J.-C., cet usage se généralisa, les hommes ayant appris à extraire le fer du minerai déposé au fond des lacs et des marais.

Ces progrès techniques favorisèrent la constitution de communautés villageoises fondées sur la coopération, elle-même étayée par de nouveaux progrès dans la culture du sol. Le processus de sédentarisation de la population semble s'achever entre 550 et 880, période appelée " période de Vendel ", du nom du village de Vendel dans la région d'Uppland, où l'on a découvert de magnifiques bateaux-tombeaux.

Période Viking (800-1050)

Outre les découvertes archéologiques, la principale source d'information sur l'histoire des Vikings est constituée par les inscriptions gravées sur les pierres runiques, coutume particulièrement répandue en Uppland au XIIsiècle. Sur ces pierres, les inscriptions perpétuent parfois la mémoire des disparus lors des expéditions qui conduisirent les Vikings, non seulement vers l'Europe occidentale, mais aussi jusqu'à la mer Noire et la mer Caspienne où ils établirent des relations commerciales avec Byzance et les royaumes arabes.

Les régions côtières, situées autour et au nord du site actuel de Stockholm, constituaient le point de départ de l'expansion viking. Leurs expéditions comptaient parfois plusieurs centaines de navires. Pour s'orienter en mer, les Vikings utilisaient des connaissances basées sur l'observation de la nature, en particulier la position de l'étoile Polaire et les vols d'oiseaux. Ils disposaient aussi d'un " bâton solaire " afin de contrôler la latitude.

Une société paysanne

Mais l'âge des Vikings se caractérise tout autant par l'existence d'une société agricole composée essentiellement de fermes isolées vivant dans une assez grande autarcie. Ces fermes étaient entourées de terres cultivées et de prés. Les forêts, peuplées d'ours et de loups, servaient de pâturage et de terrains de chasse. Le travail des champs était surtout effectué par les femmes et des esclaves, appelés trälar. La vie du paysan était étroitement liée aux changements des saisons qui déterminaient ses activités.

Les fermes comportaient en général plusieurs bâtiments : il y avait celui de la grande salle commune et du foyer, celui où l'on dormait, celui où l'on tissait, l'écurie, la grange, la forge et la brasserie. La salle commune se trouvait dans le bâtiment principal avec, au milieu du sol, un foyer ouvert tandis que le toit était troué afin de permettre l'évacuation de la fumée. Dans cette unique pièce se rassemblaient les chiens, les autres animaux domestiques, les serviteurs, les femmes et les enfants.

Religion et saga

C'est seulement à partir du XIsiècle que s'opère le début de la christianisation en Suède. Mais les missionnaires venus d'Allemagne ou de Grèce, bien qu'appuyés par le pouvoir royal, progresseront très lentement du sud vers le nord de la Suède, et les croyances païennes continueront d'imprégner longtemps encore la vie quotidienne. La mythologie païenne était en effet très riche. Ainsi, dans le temple d'Uppsala, on vénérait Odin, le dieu de la Sagesse, Thor, le protecteur contre les Géants qui hantent les zones dépeuplées, et Frej, le dieu de la Fertilité. Femmes et hommes étaient enterrés avec leurs objets personnels, parfois même, pour les plus honorés, avec leurs armes, bijoux et autres objets précieux.

On sait aussi, grâce à des textes runiques et à des textes de lois, qu'il existait à l'époque des Vikings une tradition littéraire. Alors que l'alphabet runique, apparu au IIIsiècle après J.-C., comportait 24 signes, celui en usage au temps des Vikings n'en comprenait plus que 16.

Début du christianisme (XIIe et XIIIe siècles)

La Suède ne fut véritablement christianisée qu'à partir du XIIsiècle (le premier archevêque suédois est intronisé en 1164). De très nombreuses églises furent alors construites, tout d'abord en bois, puis en pierre, dont des centaines encore visibles aujourd'hui. Parmi elles, la plus belle des églises romanes du pays, la cathédrale de Lund, construite par l'architecte italien Regnerus, fut consacrée en 1145. Durant les XIIe et XIIIsiècles, la Suède vit aussi son unité politique renforcée.

La période 1160-1250 fut marquée par une très forte rivalité pour le pouvoir séculier entre la dynastie des Sverker et celle des Erik. Or, durant la seconde moitié du XIIIsiècle, le roi parvint à accroître son influence et à imposer, par la construction de châteaux forts royaux et la création d'administrations provinciales, les lois et décrets applicables dans tout le royaume.

En 1280, Magnus Ladulås (1275-1290) put promulguer un décret donnant naissance à une noblesse séculière privilégiée et à une société organisée selon un modèle féodal.

A partir du XIVsiècle, le développement des échanges avec l'Europe et surtout avec les villes d'Allemagne de la Ligue hanséatique favorisa l'émergence d'une bourgeoisie marchande qui se spécialisa dans la vente et l'exportation du cuivre, du fer, du beurre et des peaux.

Formation de l’État suédois (1397-1560)

A la fin du XIVsiècle, et à la suite de divers héritages et alliances, le pouvoir royal se trouva concentré en Norvège et en Suède, entre les mains de la régente Marguerite, reine du Danemark. Sous son impulsion fut signé, en 1397, le traité de l'Union de Kalmar qui stipulait que désormais les trois pays scandinaves seraient gouvernés par un seul et même roi. Cette union pourtant fragilisée par de nombreux conflits dura jusqu'en 1524.

L'Union s'acheva finalement dans le drame : en 1520, le roi danois de l'Union, Christian II, fit procéder à un véritable massacre de ses opposants partisans de l'indépendance. Le Massacre de Stockholm a laissé des traces bien différentes dans la mémoire collective des Danois et des Suédois puisque, de nos jours encore, les premiers dénomment Christian II, Christian le Bon, alors que pour les seconds, il est tout simplement Christian le Tyran. Ces événements déclenchèrent en 1521 une révolte en Dalécarlie.

Tirant parti de la situation, Gustave Vasa, un noble suédois, s'empara du pouvoir. Proclamé roi de Suède en 1523, Gustave Vasa transforma peu à peu le pays en un Etat national. Les biens de l'Eglise romaine furent confisqués par l'Etat, les finances assainies, une administration nationale inspirée du modèle allemand se mit en place. Tandis que l'Etat se renforçait, l'influence luthérienne devint prépondérante : lentement, l'Eglise suédoise se sépara de Rome pour s'organiser en Eglise nationale.

Guerres et paix (1560-1658)

En 1544, le pays devint une monarchie héréditaire. A la mort de Gustave Vasa, en 1560, ses fils Erik XIV, Jean III et Charles IX se succédèrent pendant un demi-siècle. Durant cette période, la Suède connut plusieurs conflits armés contre le Danemark. L'objectif principal de ces rois était d'accroître la puissance commerciale de la Suède en mer Baltique, et de contrôler ainsi les routes commerciales vers la Russie et la Pologne.

C'est dans cet environnement incertain qu'en 1611, Gustave II Adolf, fils de Charles IX, accéda au trône. La Suède s'engagea alors, aux côtés des princes protestants d'Allemagne contre les Habsbourg et la ligue catholique, dans une guerre de Trente Ans qui allait embraser l'Europe. Les armées suédoises s'emparèrent des territoires de la Prusse orientale, traversèrent l'Allemagne et atteignirent, en 1632, la Bavière où elles remportèrent la bataille de Lützen au cours de laquelle le roi Gustave Adolf fut tué. Son héritière et fille unique Christina n'ayant alors que 6 ans, la régence fut confiée à une équipe issue de la haute noblesse et présidée par le chancelier Axel Oxenstierna. Le conflit en Allemagne prit fin en 1648.

Deux ans plus tard, en 1650, fut couronnée la reine Christina. De ses quatre années de règne, on retiendra surtout que la reine Christina était une érudite qui n'hésita pas à faire venir à Stockholm, en 1650, un dénommé René Descartes et fit de sa cour un foyer d'humanisme. Elle témoigna lors de son règne d'un intérêt certain pour le sort de la petite paysannerie, s'attirant l'hostilité de la noblesse et se convertit secrètement au catholicisme.

En 1654, la reine renonça officiellement à sa couronne, c'est son cousin Charles X Gustave qui accéda au trône. Ce roi est resté dans les mémoires : vainqueur des armées danoises durant la guerre de 1657-1658, il est parvenu à annexer non seulement la Scanie, mais aussi les provinces de Halland et de Blekinge ainsi que l'île de Gotland, alors possessions danoises. De même, lors de la paix conclue en 1658 avec le Danemark à Roskilde, les provinces de Bohuslän, de Jämtland et de Härjedalen, autrefois norvégiennes, devinrent suédoises.

La monarchie, ses nobles et ses paysans

La Suède était devenue une des plus grandes puissances européennes, mais son économie restée archaïque et son mode d'imposition en nature faisaient obstacle au financement long et coûteux de la guerre.

L'influence de la noblesse atteignit son point culminant à la mort de Charles X Gustave, en 1660, mais son fils Charles XI, dont le règne ne débuta qu'en 1672, entreprit de réduire ce pouvoir. Au début du XVIIIsiècle, le Conseil et le Riksdag avaient perdu de leur influence et la Suède était devenue une monarchie absolue, avec à sa tête le jeune monarque Charles XII, dont le règne fut écourté par une balle en 1718. Dès lors, la Suède perdit la majorité de ses possessions, à l'exception de la plus grande partie de la Finlande.

« L’ère de la liberté » et la première régence parlementaire (1718-1772)

Après la mort de Charles XII se déroula une véritable révolution parlementaire, pacifique mais radicale : le roi et le Conseil furent désormais chargés d'exécuter les décisions jusque-là prises par le Riksdag. Cette période de plus d'un demi-siècle, de 1718 à 1772, entraîna le développement des luttes politiques qui s'articulèrent autour de deux partis appelés les Chapeaux et les Bonnets.

Cette période fut aussi marquée par un grand essor culturel et scientifique : ainsi, une loi très libérale sur la presse fut-elle votée en 1766 ; d'autre part, l'invention de l'échelle thermométrique centésimale par le physicien Anders Celsius et le système de classification des plantes élaboré par le naturaliste Carl von Linné contribuèrent au renom scientifique du pays.

Époque gustavienne (1772-1809)

En 1772, le jeune roi Gustave III, neveu du Frédéric II (le Grand) de Prusse, réussit un premier coup d'Etat pacifique destiné à accroître les prérogatives royales au détriment d'une opposition parlementaire. Par la suite eut lieu une nouvelle révision de la Constitution, qui eut comme effet d'accentuer encore les pouvoirs royaux et ouvrit le début de ce qu'on appelle l'absolutisme gustavien (de 1789 à 1809). Du despotisme gustavien, on retiendra le développement des arts et des lettres, une réduction des privilèges et un remembrement des terres.

Après l'assassinat de Gustave III, en 1792, la Suède se trouva entraînée dans la guerre contre Napoléon, le régent Gustave IV Adolf ayant pris position en faveur de l'Angleterre pour des raisons de commerce extérieur. Cette stratégie royale échoua quand la Russie, devenue alliée de Napoléon après 1807, se retourna contre la Suède qui dut céder, en 1809 ses possessions finlandaises.

Le mécontentement qui s'ensuivit provoqua une révolte des militaires et des fonctionnaires qui aboutit à l'exil de Gustave IV Adolf. Son oncle, Charles XIII, monta sur le trône et une nouvelle Constitution fut adoptée. En vigueur jusqu'en 1974, elle partageait le pouvoir entre la couronne et le Parlement.

Les Bernadotte et le développement du capitalisme suédois (XIXe)

Charles XIII n'avait pas d'enfant et devait se choisir un successeur à l'extérieur. Pour des raisons stratégiques, ce fut l'un des maréchaux de Napoléon. C'est ainsi qu'en 1810, le maréchal français Jean-Baptiste Bernadotte fut désigné prince héritier. Il accéda au trône en 1818, sous le nom de Charles XIV Jean. La Suède avait dû céder la Finlande à la Russie, mais Bernadotte parvint à persuader les Danois d'accepter la Poméranie, dernière possession suédoise sur le continent européen, en échange de la Norvège. Depuis le traité de Kiel de 1814, la Suède n'a plus participé à aucun conflit armé.

Le règne de Charles XIV Jean (1818-1844) fut dominé par une lutte farouche contre une opposition libérale représentée en particulier par la presse. Les années 1830 notamment furent marquées par des mesures restreignant la liberté de la presse. Sous la pression de l'opposition, des réformes fondamentales virent le jour. Cette période de réformes libérales permit l'adoption, en 1866, d'un nouveau mode de représentation parlementaire. Désormais, l'ancien Riksdag fut remplacé par un Parlement composé de deux chambres élues, l'une au suffrage indirect, l'autre au suffrage direct, mais censitaire.

Ces réformes structurelles créèrent un terrain propice au développement d'un capitalisme industriel dynamique. Pourtant tout n'était pas au beau fixe et la crise des années 1880, liée à une baisse des prix favorisée par la concurrence des céréaliers américains, contribua à l'émigration de 325 000 Suédois vers les Etats-Unis.

Durant les deux dernières décennies du XIXsiècle, l'expansion rapide d'une classe ouvrière industrielle favorisa l'organisation syndicale et politique extraparlementaire. Fondé à Stockholm en 1889, le Parti social-démocrate fit de la lutte pour le suffrage universel égalitaire son objectif principal.

Neuf ans plus tard, en 1898, les syndicats fondèrent la Confédération générale du travail de Suède (LO). En avril 1902 éclata une grève générale de trois jours pour exiger l'instauration du suffrage universel, qui fut acquis en 1909 pour les hommes et en 1921 pour les femmes. Sur le plan diplomatique, le XIXsiècle fut marqué avant tout par l'union avec la Norvège. Bien qu'autonome sur le plan interne, la Norvège était représentée à l'extérieur par le roi de Suède, et les conflits de pouvoir entre les monarques suédois et les gouvernements norvégiens s'accentuèrent tout au long du siècle au point qu'en 1905 l'union entre les deux pays fut dissoute pacifiquement.

Le XXe siècle

Les élections de 1911 qui, pour la première fois, consacraient la seconde Chambre grâce au suffrage universel, donnèrent la victoire au Parti libéral : le roi Gustave V (1907-1950) chargea Karl Staaff de constituer un gouvernement libéral.

Durant la Première Guerre mondiale, la Suède observa une politique de neutralité à l'égard des belligérants, non sans difficulté. D'abord, les classes dirigeantes, mais aussi les dirigeants du Parti social-démocrate avaient des liens étroits avec l'Allemagne. Enfin, la Russie tsariste, qui comprenait désormais la Finlande, inquiétait de nombreux Suédois favorables à une alliance entre la Suède et l'Allemagne.

La fin de la guerre permit à la démocratie de s'imposer définitivement sur l'aristocratie. La réforme constitutionnelle, mais aussi le chômage qui ne cessait d'augmenter, marquèrent les années 1920 d'une grande instabilité politique. Entre 1920 et 1932, neuf gouvernements se succédèrent, dominés tantôt par les sociaux-démocrates, tantôt par les libéraux et les conservateurs. Les politiques menées se différenciaient assez peu cependant, tandis que les tensions sociales se multipliaient.

Les émeutes d'Ådalen, en 1931, précédèrent, dans un climat de fortes tensions sociales, la victoire des sociaux-démocrates aux élections de 1932. Un accord avec le Parti agrarien permit l'adoption d'un programme anticrise grâce à une politique de grands travaux publics et par un vaste programme social favorisé notamment par l'adoption, en 1938, de la loi sur les deux semaines de congés payés annuels pour tous. En 1938, un accord signé à Saltsjöbaden illustre parfaitement ce qu'on a considéré depuis comme le " modèle suédois ".

Avec le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, la Suède adopta, à l'instar des autres pays nordiques, une position de neutralité mise à l'épreuve dès l'hiver 39-40 par la guerre entre la Finlande et l'Union soviétique. Lorsqu'en avril 1940, les nazis occupèrent le Danemark et envahirent la Norvège, la pression allemande pour permettre l'acheminement, à travers le territoire suédois, de matériel destiné à l'attaque contre la Norvège s'accentua au point de faire céder le gouvernement suédois. De nos jours, ces concessions demeurent très discutées. Dans le même temps, la Suède permit à 7 500 juifs danois d'échapper à la persécution nazie en les accueillant et contribua par l'action de personnages, comme le comte Folke Bernadotte et Raoul Wallenberg, à sauver du génocide des dizaines de milliers d'autres juifs.

L’après-guerre et la social-démocratie

Les années d'après-guerre furent celles des réformes. Les gouvernements sociaux-démocrates firent voter des lois de protection sociale concernant en particulier la majoration de la pension vieillesse et l'instauration de l'allocation familiale et de l'assurance-maladie. La fiscalité fut révisée dans un sens plus progressiste. En 1970, l'ancien Riksdag à deux Chambres, inspiré de la constitution de 1809, fut remplacé par un Riksdag à Chambre unique. En 1975, une nouvelle Constitution réduisit les pouvoirs royaux à des fonctions purement cérémonielles (depuis cette date, il appartient au Premier ministre et non au roi de former les gouvernements et de présider les Conseils des ministres).

A l'exception des périodes allant de 1976 à 1982 et de 1991 à 1994, les gouvernements successifs furent presque toujours à dominante social-démocrate avec, à leur tête, entre 1969 et 1976, puis entre 1982 et 1986 - année où il fut assassiné - Olof Palme, dont l'action sur le plan international est restée dans bien des mémoires. Si, sur le plan de la politique intérieure, l'action du Premier ministre s'inscrivait dans la continuité de ses prédécesseurs sociaux-démocrates (lutter contre le chômage en renforçant le rôle de l'Etat-providence), dans le domaine de la politique étrangère, Olof Palme n'hésita pas se démarquer des Etats-Unis en critiquant durement leur intervention au Vietnam et en prenant parti pour les pays du tiers-monde.

Sa succession à la tête du gouvernement par Ingvar Carlsson précipita, aux élections de 1991, la victoire d'une coalition des partis de droite dirigée par Carl Bildt. Alors, le gouvernement se fixa comme principal objectif l'entrée de la Suède dans l'Union européenne. La victoire du oui, avec 52,3 % des suffrages, ainsi que le retour au pouvoir, en septembre 1994, des sociaux-démocrates partisans du oui montrèrent qu'une page importante du " modèle suédois " venait d'être tournée.

La Suède dans l’Union européenne

Le 1er janvier 1995, la Suède, accompagnée de la Finlande et de l'Autriche, fit son entrée dans l'Union européenne. Une adhésion qui n'a pas remis en cause les spécificités nationales du pays, qui a pu conserver ses traditions, ses coutumes et ses particularités. Les Suédois purent continuer à chiquer du tabac (snuss), en dépit de son interdiction dans le reste de l'Union, et le vin, les spiritueux et la bière forte continuèrent à être vendus exclusivement dans les magasins d'Etat (System Bolaget). Après leur victoire aux élections de septembre 1994, les sociaux-démocrates, avec en tête Göran Persson (Premier ministre de 1996 à 2006), entreprirent une politique de rigueur visant à contenir le chômage et la récession : réduction du déficit des finances publiques, budget national voté en équilibre, réduction de la dette publique, d'une part ; mesures en faveur de la retraite anticipée, de l'emploi public et de la formation professionnelle d'autre part.

En 1999, face à la profonde division du gouvernement, la Suède n'intégra pas l'Union économique et monétaire. Ce qui pouvait n'être finalement qu'un délai de réflexion est cependant révélateur d'un certain malaise de l'ensemble des pays scandinaves (la Finlande exceptée) face à une UEM qui leur apparaît lointaine, géographiquement et politiquement. Pour les sociaux-démocrates, la situation s'annonçait donc délicate, mais Göran Persson et son gouvernement réussirent à récupérer les faveurs de l'opinion publique grâce à des mesures efficaces (redressement des finances publiques, baisse du chômage) et à des actions populaires (instauration d'un plafond de redevance dans les services d'accueil de l'enfance). La présidence suédoise de l'Union européenne au printemps 2001, globalement considérée comme efficace et positive, notamment sur les questions de l'élargissement de l'Union, a joué un rôle dans la nouvelle bonne image du gouvernement.

Vers une nouvelle ère ?

De 1994 à 2006, le parti social-démocrate a donc régné sur le pays. Son leader d'alors, Göran Persson, s'est pourtant vu fragilisé en 2004 par le refus populaire d'adhérer à la monnaie unique européenne, adhésion qu'il avait soutenue et pour laquelle il avait demandé un reférendum.

Le 17 septembre 2006, la coalition de centre-droit remporta les élections législatives. Ce fut une rupture profonde dans le paysage politique suédois. Ces résultats mirent fin à douze ans de règne social-démocrate, et à la carrière de Göran Persson. Il fut remplacé au poste de ministre d'Etat par un quadragénaire de tendance libérale : Fredrick Reinfeldt, qui a su fédérer les différentes formations politiques suédoises. Le Parti social-démocrate demeure le premier parti suédois mais s'est retrouvé isolé face à la coalition. Reinfeldt s'est affirmé plus porté vers la construction européenne et l'Otan que son prédécesseur, même si la question de l'euro n'est pas encore revenue à l'ordre du jour. A la présidence de l'UE en 2009, la Suède a plutôt bien maîtrisé son sujet et, après un mandat qui sans surprise a mené une société traditionnellement " providence " sur la voie d'un libéralisme décomplexé, Reinfeld a été reconduit dans ses fonctions en septembre 2010 après des élections tourmentées. Une fois de plus, le Parti social-démocrate reste le parti majoritaire à l'assemblée, mais, comme quatre ans auparavant, la coalition de droite l'a emporté de peu et a gagné la majorité, bien que non absolue, sur les bancs du Riksdag. Mais c'est l'entrée du parti d'extrême droite Sverige Demokraten (Démocrates suédois) au Parlement, dans une position inespérée d'arbitre, qui a retenu l'attention du pays, provoquant de grandes manifestations de contestation et une onde de choc dans tout le pays. Le " modèle suédois " vient de prendre un coup et l'arrivée de 20 députés ultra-nationalistes sur les bancs de l'assemblée prouve que la démocratie suédoise présente aussi ses faiblesses. Ni la gauche ni la droite n'a pourtant accepté un quelconque compromis avec le parti nationaliste. Reconduits au pouvoir, les Modérés de Reinfeldt, qui ont obtenu 30 % des voix du pays, vont continuer leur politique de privatisation et de libéralisation d'une société qui, anciennement symbole européen de l'Etat providence et de la social-démocratie, a bel et bien tourné la page.

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