Guide Aeolian Islands : Mode de vie

Vie sociale
Caractère et identité

La personnalité des Siciliens est différente de celle des Italiens, le caractère insulaire de la Sicile jouant certainement un grand rôle dans cette différence. Cicéron définissait déjà les Siciliens comme " des gens intelligents et méfiants, nés pour la controverse ".

Mais, sous un air grave et discret, se cache un peuple accueillant et chaleureux, qui ne manque pas d'humour et qui a toujours une berzelletta (histoire drôle) à raconter. Au contraire de tous les clichés sur le reste des Italiens (parfois vrais concernant les Napolitains), les Siciliens sont des gens souvent réservés, intérieurs, mélancoliques et silencieux. Ainsi, ce qui pourrait passer parfois pour une certaine froideur, une méfiance ou même une agressivité maladroite, n'est qu'une manière de se protéger.

Le Sicilien, et c'est vrai en particulier dans la population la plus défavorisée, est toujours attentif et prêt à tout pour vous aider. N'hésitez donc jamais à demander le moindre renseignement ou aide, vous ne serez pas déçu !

Education

Vous verrez certainement beaucoup de jeunes adolescents ou même des enfants travailler comme commerçants ou dans l'agriculture et la pêche. Issus de classes sociales les plus simples, ils participent et collaborent naturellement à l'entreprise familiale et en perpétuent la tradition, avec beaucoup de passion et de fierté. Mais l'école est bien sûr obligatoire, et c'est le même système scolaire dans toute l'Italie.

Il est divisé en quatre périodes d'étude : scuola materna (de 3 à 5 ans), scuola elementare (de 6 à 10 ans), scuola media (jusqu'à 13 ans), puis 5 ans de scuola secondaria avant l'université éventuellement, les études obligatoires s'arrêtant à 16 ans.

L'accès à des études supérieures est évidemment la seule solution pour certains milieux défavorisés de trouver une sécurité pour leurs enfants, alors que leur travail traditionnel (artisans, pêcheurs, agriculteurs...) est de plus en plus écrasé par la globalisation. Il y a dans ces mêmes milieux (et contrairement au Nord) un grand problème d'analphabétisme, qui est bien sûr plus présent chez les anciens. Pour les plus jeunes, savoir lire et écrire est un moyen essentiel pour s'intégrer au reste de la société, quand la famille ne peut plus être la solution pour l'avenir. Enfin, la religion (et en particulier la figure incontournable du prêtre) est toujours très présente dans l'éducation des Siciliens. Pour beaucoup de familles, le catéchisme reste un passage obligé, et le curé demeure un interlocuteur privilégié et respecté des jeunes, un garant d'une éducation digne de ce nom !

Un système social à deux vitesses

Comme on l'a noté précédemment, le quart de la population vit en dessous du seuil de pauvreté, et le fossé est grand (même vertigineux) entre le Nord et le Sud, mais aussi au coeur même de la population.

Entre le centre des terres et les côtes plus industrialisées et touristiques, ou encore entre les gens de la " famille " et ceux qui n'en font pas partie. On ressent ainsi de fortes oppositions de classes et une réelle difficulté de dialogue. Le taux de chômage est élevé (25 %), les salaires deux fois moins élevés que dans le reste de l'Italie et la précarité touche surtout les jeunes et les femmes.

En cela, de nombreux Siciliens se sentent exclus et lâchés par les classes dirigeantes ; la crise Fiat (décembre 2002) à Termini Imerese, durant laquelle Berlusconi proposait aux heureux licenciés de trouver du travail au noir, n'a pas apaisé la blessure. Mais la pauvreté n'est pas visible en Sicile comme elle peut l'être ailleurs : par exemple, on ne voit presque jamais de SDF dans les rues. Ceux, qui ont quelques difficultés financières, sont presque toujours accueillis dans leur famille et travaillent effectivement au noir. Les liens toujours très forts qui lient ses membres entre eux ne sont pas une légende, et cette solidarité ou ce " tissu social permanent " - seule alternative au vide laissé par les autorités - protège les plus démunis face aux risques de désocialisation et d'anomie.

Santé

Des similitudes apparaissent entre les systèmes français et italien. Ainsi, comme les Français, tous les Italiens sont couverts par l'Assurance maladie gouvernementale, et le nombre de médecins dans les deux pays est le plus élevé d'Europe : 1 pour 177 personnes. Le système de santé italien n'est pas sans lacunes, bien qu'il représente une part non négligeable du PIB : environ 7 %. Né en 1978 du regroupement d'unités dispersées, le service public de santé va mal ! Les services d'urgence des hôpitaux sont peu efficaces. Pour les visites spécialisées, il faut attendre de 2 à 3 mois. Cette crise, commune à de nombreux pays (la France n'y échappe pas non plus), a des causes profondes, notamment le vieillissement de la population et le changement de comportements face à la maladie. Mais, joignant l'utile à l'agréable, les Siciliens pratiquent le sport à la salle de gymnastique, c'est-à-dire nella palestra, car si la santé est une chose, la quête d'un corps parfait en est une autre. A toute heure, même tard le soir, les salles de sport sont pleines. Mens sana in corpore sano.

Mœurs et faits de société
Place à la Donna !

Les femmes et les Italiens, ce n'est pas une légende ! Pétrarque chantait Laura, Dante louait Béatrice... et Fellini, Antonioni leurs égéries respectives. Les Siciliens n'échappent pas à la règle. Vierge, mamma, idéal de beauté et de pureté, la femme est vénérée et presque redoutée. Les femmes siciliennes aiment séduire et jouent de leur charisme en alliant cette image sacrée et une grande sensualité en même temps. Mais si les Siciliens ne sont pas avares en superlatifs sur leur sujet de prédilection (avec le foot), les féministes ont encore un peu de travail à faire. Un proverbe dit : " Bona donna, donna chi nun parla " (" Une femme bien est une femme qui ne parle pas... "). La femme, même si, dans certains milieux privilégiés, elle accède de plus en plus à des professions qui lui étaient quasiment interdites, doit rester plus discrète et s'occuper des affaires qui lui sont destinées par tradition (la maison, les enfants...). Et même chez les plus jeunes, cette règle persiste !

Famille

Un beau proverbe dit : " La mère est ton âme, celui qui la perd ne la retrouve plus. Honore toujours et écoute ton père, même les pierres t'aimeront. " Plus qu'ailleurs en Italie, la famille est sacrée pour le Sicilien. L'honneur de la famille est ce qu'il faut préserver avant toute chose. L'homme en est la figure centrale et le chef de famille décidant de la conduite morale de tous, et en particulier des femmes. Mais évidemment la figure de la mère reste, comme celle de la Madone, le coeur secret intouchable.

Les garçons ont un statut privilégié de chef, mais ils sont surtout là pour veiller sur les femmes contre les éventuels courtisans. La famille compte plus que tout, plus que l'Etat. " C'est sa seule patrie ", écrit Leonardo Sciascia. Pour le Sicilien, c'est son refuge, et il sait qu'il pourra toujours compter sur son secours.

On reste longtemps à vivre sous le même toit (même à la trentaine passée) avec les parents et parfois les grands-parents, car c'est là finalement qu'on se sent le mieux, mais désormais aussi parce que c'est rare d'avoir un travail qui suffit pour vivre.

Moeurs

Les ragazzi siciliens sont aussi démonstratifs que tout Italien qui se respecte devant la donna qui passe dans la rue. Même si le rapport de séduction et les jeux de regard sont très forts, les garçons sont, malgré tout, respectueux et un peu embarrassés de certains principes enseignés par monsieur le curé : 9 couples sur 10 se marient à l'église.

Quant à l'homosexualité, qui a connu ses " heures de gloire " lorsque Von Gloeden " lança la mode " à Taormina en photographiant de jeunes pâtres, elle commence - dans certaines villes comme Catane, Syracuse et un peu Palerme - à être une réalité déclarée.

Retrouvez les coordonnées des différentes associations et lieux gays siciliens sur le site généraliste italien (www.arcigay.it).

Religion

La religion est évidemment très présente partout sur l'île, et cette observation du grand scrutateur de la Sicile pourrait sembler ironique. Mais bien au contraire, elle dévoile le rapport complexe que ses compatriotes entretiennent avec le sacré. Depuis la toute première présence des hommes sur son sol, la Sicile est le lieu privilégié des fusions de nombreux rites religieux. Tout ce passé définit le rapport particulier des Siciliens au divin qui relève parfois davantage de la superstition : les cérémonies païennes, la présence musulmane, l'Inquisition espagnole qui apporta les processions de la Semaine Sainte, toujours identiques à celles d'Andalousie, la vénération des saints qui rythme la vie de chaque jour et qui rappelle beaucoup celle des idoles et des dieux antiques, mais aussi les légendes, les mythes, ou encore le théâtre et les jeux. Tout cela a façonné une religion propre aux insulaires.

Les Siciliens appellent les saints à la rescousse au moindre coup de sirocco. Mais les superstitions ne sont pas forcément d'ordre religieux. Ainsi, vous pourrez peut-être voir, dans certains villages de l'intérieur de l'île, des façades de maison avec une paire de ciseaux retournée incrustée dans le mur : elle est destinée à éloigner le mauvais sort et à mettre en garde l'ennemi (dissuasif, non ?).

Mais surtout, la véritable présence du sacré, c'est la mort qui rôde partout et fait partie intégrante de la vie du Sicilien. Il y est fait référence à tous les coins de rues, par les affiches de décès que l'on placarde sur les murs, par de petits signes de croix effectués au passage d'un corbillard ou lorsqu'on longe un cimetière. La jeunesse sicilienne est très attachée aux traditions, aux processions religieuses, et les jeunes Siciliens vous prouveront qu'on peut très bien être à la fois " fashion victim " et un peu " grenouille de bénitier " ! Enfin, la religion structure la plupart des rites sociaux : ainsi, n'est-ce pas une forme de reconnaissance de l'assistance divine que d'utiliser les marches des édifices religieux pour en faire, selon la vocation du lieu, un carrefour de rencontres.

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