Guide Sudan : Histoire
Le Soudan a été habité par des populations nomades probablement depuis des dizaines de milliers d'années. Les premières traces d'habitation sédentaire dans le pays remontent à 10 000 ans, au Néolithique, à une époque où le climat était bien plus frais et humide qu'aujourd'hui. Les témoignages concrets de cette époque sont essentiellement les nécropoles, et c'est par leurs rites funéraires que les populations préhistoriques du Soudan nous sont d'abord connues. Leur présence est attestée, ce n'est pas surprenant, sur les bords du Nil, en Nubie, mais aussi beaucoup en Gezira. C'est toutefois dans le voisinage de l'Egypte, devenue pharaonique, que les premières civilisations vont s'épanouir au Soudan, faisant entrer la région dans le monde antique.
Ismaïl al-Azhari
Fils de notable né en 1900 à Omdurman, un an après l'établissement du condominium anglo-égyptien, al-Azhari fut président de la République du Soudan de 1965 à 1969. Figure du nationalisme soudanais, il soutint pourtant l'union avec l'Egypte jusqu'au coup d'Etat des Colonels au Caire, en 1952. Il fut l'un des principaux interlocuteurs des Anglais dans les négociations portant sur l'avenir du pays. Après la victoire de son parti, le National Unionist Party (NUP), aux élections législatives de 1953, il devient le premier Premier Ministre de son pays. Se ralliant à l'opinion indépendantiste visiblement majoritaire au Soudan, il fragilise sa coalition et laisse les premiers troubles éclater dans le Sud non-arabe et non-musulman. Rejeté dans l'opposition peu après l'indépendance, il est plébiscité pour redresser le pays en 1964. Mais devenu un président sans grands pouvoirs, il sera finalement renversé par le général Nimeiry, en 1969, et mourra la même année.
Joséphine Bakhita
Figure du christianisme soudanais, elle est reconnue comme la sainte patronne du Soudan. Née en 1867 au Darfour, elle est enlevée par des négriers arabes et convertie de force à l'islam. Elle sert d'esclave à plusieurs maîtres successifs qui la traitent rudement, avant d'être achetée par un diplomate italien qui la ramène en Europe, en 1885, pour servir de nourrice à sa fille. Baptisée en 1890, elle est affranchie sur décision de la Justice italienne, puis entre dans les ordres. En 1902, elle rejoint le monastère de Schio, près de Venise, où elle passera le reste de sa vie. Après la publication de son histoire, elle se fait connaître en Italie pour sa piété et sa gentillesse, ainsi qu'en tant que symbole de la lutte contre l'esclavage. Gravement malade, elle meurt en 1947. Béatifiée en 1992, elle est canonisée en 2000 par le pape Jean-Paul II.
Osman Digna
Symbolise l'attachement du peuple Béja à la nation soudanaise. Né en 1836 dans la tribu des Hadendoas, Osman Ali est un marchand d'esclaves opérant entre l'Egypte et le Soudan. Il s'oppose à la mainmise grandissante des Anglais sur les affaires de la région en soutenant la rébellion du colonel égyptien Ahmed Orabi, en 1880. Après son échec, Osman Ali regagne sa terre natale pour échapper aux Egyptiens. Il rejoint les rangs des partisans du Mahdi et devient alors l'un des brillants chefs militaires du leader religieux. Il combat les Anglo-Egyptiens sur la côte de la mer Rouge et devient Osman "Digna". En 1884, il soumet les Anglo-Egyptiens à Tokar. L'année suivante, il participe à la prise de Khartoum. Il subit toutefois de lourdes défaites par la suite, à mesure de la reconquête anglaise. Capturé peu après la chute de l'Etat mahdiste, en 1900, il finit ses jours en Egypte où il meurt en 1926, à l'âge de 90 ans. Par son courage et sa détermination, il reste un modèle de patriotisme au Soudan.
John Garang de Mabior
Né à Bor, dans le Sud-Soudan, en 1945, il est considéré comme l'un des principaux artisans de la lutte pour la reconnaissance des droits des peuples du Sud contre le régime de Khartoum. Il rejoint le mouvement séparatiste Anyanya dès 1970, avant de servir dans l'armée régulière soudanaise à la suite des accords de paix d'Addis-Abeba. Il s'oppose à l'application de la sharia en 1983 et fonde le Sudan People's Liberation Movement/Army (SPLM/A), mouvement rebelle réclamant une réforme politique visant à instaurer la démocratie et le fédéralisme au Soudan. Il obtient un cessez-le-feu en 2002, puis signe, en janvier 2005, le Comprehensive Peace Agreement (CPA), qui établit une période de transition fédérale où il devient vice-président de la République au côté du président al-Bashir. Garang périt peu après dans un accident d'hélicoptère, provoquant des émeutes à Khartoum. Il est remplacé à son nouveau poste par Salva Kiir, apparemment plus favorable à l'indépendance complète du Sud-Soudan. L'héritage de John Garang, au-delà de la lutte, est l'idée du "nouveau Soudan" (New Sudan), dont se réclament aujourd'hui nombre de figures politiques du pays, même au nord où Garang a finalement su se faire admirer.
Mohammed Ahmed al-Mahdi
Né en 1844 à Dongola, il est considéré comme un héros national, plébiscité tant par les nationalistes que les islamistes soudanais. Chef religieux mystique, auto-proclamé Mahdi, c'est-à-dire l'envoyé d'Allah annoncé par les Ecritures, il unit les peuples de Nubie et jusqu'au Kordofan contre les Anglo-Egyptiens. Depuis l'île d'Aba, il s'empare d'El-Obeid, mais surtout de Khartoum, en 1885, où est tué le fameux gouverneur anglais, héros colonial ayant triomphé en Chine, Charles Gordon. Bourreau des Britanniques, le Mahdi aura même l'audace de demander à la reine Victoria de se convertir à l'islam. Mais, quelques mois après la prise de la capitale, il meurt de typhoïde, avant d'avoir concrétisé ses projets de libérer les Lieux saints en Arabie. Toutefois, l'Etat indépendant qu'il avait créé lui survivra treize ans. Le Mahdi repose aujourd'hui dans sa tombe à coupole argentée d'Omdurman. Son influence politico-religieuse s'est perpétuée jusque dans le Soudan du XXIe siècle.
Mek Nimir
Le "Roi-Tigre". Réputé pour avoir corrigé les Egyptiens après qu'ils eurent infligé une humiliation à ce chef de tribu arabe Ja'aliyine. En 1822, Mek Nimir et ses partisans mettent le feu au camp des troupes égyptiennes d'Ismaïl Pasha, fils vaniteux et peu charismatique du khédive Méhémet-Ali. Ismaïl avait réclamé un tribut exhorbitant à ces populations qu'il méprisait. Les lourdes pertes égyptiennes vont entraîné des représailles violentes contre l'ensemble des villages de la région. Après avoir combattu l'ennemi, Mek Nimir fuit finalement les massacres et gagne les marches de l'Ethiopie. On dit qu'il fonda le village de Metama, aujourd'hui situé à la frontière entre le Soudan et l'Ethiopie, et lui donna le nom de son village d'origine au bord du Nil. Quant au nom de Mek Nimir, il a été donné à l'une des grandes artères du centre de Khartoum, prolongée par son pont sur le Nil Bleu depuis 2007.
Taharqa
Roi de Koush et pharaon d'Egypte, mentionné dans la Bible, il est le plus célèbre des "Pharaons Noirs" qui contrôlèrent à la fois la Nubie et l'Egypte, jusqu'aux confins de la Palestine et des côtes libyennes. Son règne (-690 ; -664) correspond à la fois à l'âge d'or et au déclin de la XXVe dynastie. Il fait édifier de nombreuses stèles et monuments, de sa capitale Napata jusqu'à Karnak et Thèbes en Basse-Egypte. Parallèlement, il doit lutter contre l'expansion des Assyriens, menés par Assarhaddon puis Assurbanipal, qui s'emparent finalement de Memphis et affaiblissent progressivement la tutelle nubienne sur l'Egypte. Taharqa mourut sans reconquérir les régions perdues. Il fut enterré dans une pyramide de la nécropole royale de Napata, à Nuri.
Les Egyptiens de l'Ancien Empire (XXVIIIe-XXIIIe siècle av. J.-C.) connaissent les Nubiens, habitant les terres de "Koush" (une appellation égyptienne), pour leur vaillance au combat et leur habileté au tir à l'arc (d'où le nom attribué par les Egyptiens de "Terre de l'arc"). Ces Egyptiens se retrouvent fréquemment à guerroyer au-delà de la première cataracte du Nil (aujourd'hui au niveau du barrage d'Assouan), pour s'arroger une partie des riches ressources du sous-sol nubien, dont le cuivre, l'or et les pierres de taille, ou pour se fournir en esclaves.
Cela n'empêche pas la cité de Kerma de s'ériger en centre politique et économique nubien au milieu du IIIe millénaire avant notre ère. La ville et la région alentour se placent sous l'autorité d'un roi. La civilisation du royaume de Kerma tire une partie de ses richesses des routes commerciales sur lesquelles il se trouve placé. Koush devient l'antichambre de l'Afrique pour l'Egypte, et vice versa. Des murailles et des forteresses défensives sont progressivement aménagées. A l'instar peut-être des pyramides d'Egypte, Kerma fait aussi construire des édifices religieux en briques de terre de plusieurs dizaines de mètres de diamètre, connus aujourd'hui sous le nom de deffufas. Ces édifices ont pu servir de temple, d'autel sacrificiel ainsi que de tombes royales.
A partir de la VIIe dynastie égyptienne (XXIIe siècle av. J.-C.), l'influence de Kerma gagne du terrain au nord jusqu'à Assouan, et au sud jusqu'à la cinquième cataracte. Les Koushites profitent de l'invasion des Hyksôs en Egypte pour s'implanter encore plus au nord, mais le redressement de l'Egypte, au Nouvel Empire, va inverser la tendance à partir du milieu du IIe millénaire.
Kerma est affaibli par un pouvoir de plus en plus décentralisé. La cité-Etat a désormais plus de mal à contrôler sa campagne où de gros villages se sont développés et devenus autonomes. La reconquête de l'Egypte par les pharaons Kamosé puis Ahmôsis passe par la soumission de la Nubie, définitivement obtenue par Thoutmôsis, de la XVIIIe dynastie, qui fait détruire Kerma et rebâtir une nouvelle ville, Pnoubs, pour faire table rase du passé. Cela marque le début de la domination égyptienne sur la Nubie.
Des temples égyptiens sont bâtis pour rappeler la supériorité égyptienne et étendre le culte d'Amon. Les temples de Soleib ou de Kawa datent de cette période. Ramsès II ou Toutankhamon sont à l'époque représentés en vainqueurs des Nubiens. La Nubie est contrôlée par un proche du pharaon, surnommé "fils royal de Koush", véritable vice-roi égyptien de la Nubie. Le nouveau centre politique se déplace plus en amont du Nil, à Napata, où un grand temple d'Amon est bâti au pied du djebel Barkal. La présence d'un éperon rocheux en forme d'uraeus, symbole royal d'un cobra dressé, convainc probablement les Egyptiens de la nature divine de la montagne qu'ils considèrent alors comme le lieu de naissance d'Amon.
Il faut ajouter qu'à cette époque le culte, les arts, l'écriture et les traditions égyptiennes se diffusent très largement chez les Nubiens. A la fin de l'âge d'or égyptien du Nouvel Empire, la Nubie reprend son indépendance grâce au développement d'une aristocratie locale. C'est le début de la civilisation koushite de Napata, désormais imprégnée de culture égyptienne.
Tirant profit de la division régnant en Egypte où plusieurs dynasties se côtoient, les rois nubiens étendent depuis Napata leur influence vers le nord, tandis qu'au sud ils atteignent les environs de la sixième cataracte. La Haute Egypte est progressivement soumise au VIIIe siècle sous les règnes de Kashta, d'Alara et de Piye, qui se réclament de la lignée des pharaons. La XXVe dynastie égyptienne, importée de Nubie, soumet l'Egypte thébaïque. Elle étend même le contrôle des fils de Nubie vers la Palestine et la Libye. C'est la période des "Pharaons Noirs". Si des peuples non-égyptiens s'étaient déjà arrogés le titre de pharaon, c'est la première fois que des dirigeants "noirs" contrôlent l'Egypte tout entière. Les Grecs parlent plutôt des Nubiens comme des souverains "éthiopiens", terme qui originellement est aussi lié à la couleur de peau.
Point de destructions en Egypte, comme il avait pu s'en passer en Nubie 1000 ans auparavant. En fait, les conquérants nubiens remettent au goût du jour les anciennes traditions égyptiennes qui ont fait la grandeur de la région sous l'Ancien Empire. Ils embellissent les monuments existants, comme à Karnak, et se font couronner en Egypte. Importance de la terre-mère oblige, ils se font tout de même enterrer (dans des pyramides !) en Nubie, à El-Kurru près de Napata. Seul Taharqa choisit un site de repos éternel différent, à Nuri sur l'autre rive du fleuve. Taharqa (voir "Figures historiques") est parmi les Paharaons Noirs à la fois le plus connu, le plus puissant et aussi celui à partir duquel la situation se dégrade pour les Nubiens en Egypte. Son règne (de -690 à -664) correspond à l'expansion des Assyriens qui finissent par chasser les Koushites d'Egypte. La XVIe dynastie prend le relais par l'intermédiaire de Psammétique II, qui ravage la Basse-Nubie jusqu'à Pnoubs et Kawa. Les souverains de Napata se rabattent alors sur leur flanc sud et la relation reste occasionnellement conflictuelle avec l'Egypte.
Napata végète après avoir connu son heure de gloire. Toutefois, contrairement à l'Egypte, la région ne subit pas de grosses invasions. Sous la pression des potentats du Nord et peut-être aussi en raison d'une dégradation du climat, les souverains nubiens décident de remonter le Nil pour se fixer à Méroé. à partir du règne du roi Arkamani. Celui-ci est le premier à se faire enterrer dans cette cité, après une sanglante réforme religieuse qui a mis au pas le puissant clergé traditionnel en -218. La culture, sans se "déségyptianiser", s'enrichit de nouvelles influences locales, mais aussi asiatiques. Apademak, le dieu-Lion, rejoint Amon dans le panthéon koushite. L'écriture hiéroglyphique est désormais délaissée au profit du développement d'une écriture dite "méroïtique", encore indéchiffrable aujourd'hui. De grands temples et des palais sont construits. De cette époque datent notamment les très fameuses pyramides qui sont aujourd'hui l'icône touristique du pays.
Les Grecs parlent de Méroé comme d'une "île", se référant au territoire situé entre le Nil et ses affluents Bleu et l'Atbara. La région, comme la Basse-Nubie, est riche en minerais, particulièrement le minerai de fer, utile pour la guerre et l'agriculture par exemple. La plus grande proximité avec l'Afrique noire est rappelée par la présence d'éléphants, dont certains ont probablement servi dans l'armée après domestication. Méroé entretient à cette époque des relations avec les Grecs, les Perses, les Ethiopiens, les royaumes tribaux du Sud, puis avec les Romains qui mettent Napata à sac peu avant l'ère chrétienne. Souhaitant soumettre la Haute-Egypte et faire du royaume koushite un vassal, l'empereur Auguste s'est confronté aux femmes souveraines de Méroé - les candaces - Amanirenas, puis sa fille Amanishakheto. Les deux puissances parviennent, à Samos, à conclure un traité de paix défavorable au royaume de Méroé. Le commerce prospère néanmoins. Les relations restent cordiales et le Soudan fait même l'objet d'une expédition scientifique romaine à la recherche (déjà) des sources du Nil, expédition qui finit dans les marais inhospitaliers de l'actuel Sud-Soudan.
Le royaume connaît un déclin accéléré à partir du IIe siècle, sans que l'on sache vraiment pour quelles raisons. L'avancée du désert et l'appauvrissement des ressources naturelles ont pu affaiblir le pouvoir central. En 350 de notre ère, les troupes axoumites d'Ethiopie envahissent le nord du Soudan et ravagent la cité de Méroé, qui ne se relèvera pas. C'est la fin des royaumes koushites et de l'Antiquité nubienne.
La disparition d'un pouvoir central favorise la pénétration des influences étrangères qui s'incarnent, dès le Ve siècle, en des missionnaires chrétiens venus d'Egypte. Les héritiers des Koushites sont principalement les Nobades, peuple de tribus nubiennes également présentes en Haute-Egypte, qui s'opposent aux Blemmy, ancêtres des Béja de la mer Rouge. Trois royaumes émergent quelques décennies après la disparition du pouvoir méroïtique : celui de Nobatie au nord, près des première et deuxième cataractes, celui de Makourie, entre les troisième et quatrième cataractes, et celui d'Alodie, au niveau des cinquième et sixième. Faras, Dongola (aujourd'hui Old Dongola) et Sobat sont respectivement les trois nouveaux centres de pouvoir.
La christianisation du Soudan s'effectue alors que les chrétiens se déchirent dans l'Empire byzantin, entre monophysites et nestoriens, sur la question théologique qui s'interroge sur la nature unique (divine) ou double (à la fois divin et humain) du Christ. L'adoption du monophysisme par les Nubiens les rapproche des Byzantins et des Coptes, auxquels ils empruntent les techniques artistiques et une partie de la liturgie. Des cathédrales et des églises sont construites le long du Nil. Le clergé, particulièrement les évêques, deviennent des figures centrales du pouvoir, alors que les souverains semblent être en retrait des prises de décision.
Au début du VIIIe siècle, la Makourie du roi Merkurios absorbe sa voisine nobatienne et vassalise l'Alodie. L'époque est paradoxale. C'est celle du christianisme triomphant en Nubie alors que l'islam, apparu quelques décennies auparavant, est en pleine expansion et exerce désormais une forte pression depuis l'Egypte et la mer Rouge. En 652 déjà, les Nubiens ont repoussé une première invasion. La confrontation est de nouveau inévitable mais, chose surprenante, les armées musulmanes sont finalement contenues (malgré le saccage de Dongola et de sa basilique), et un traité de paix est même signé - le bakht - qui prévoit des accords de commerce élargis et va durer plusieurs siècles. La société nubienne se militarise fortement. L'architecture également, jusque dans les églises qui sont fortifiées. La domination arabo-musulmane en Egypte coupe partiellement l'Eglise nubienne de ses bases. L'élite religieuse se referme sur elle-même. Le peuple accueille de plus en plus favorablement la cohabitation avec les musulmans, et les conversions finissent par s'enchaîner.
Les différents pouvoirs qui se succèdent au Caire exercent une pression de plus en plus forte sur un royaume de Dongola de plus en plus affaibli par les divisions internes. Seuls les Fatimides chi'ites, bien esseulés face à leurs voisins sunnites, sont les plus accommodants avec une Nubie médiévale alors en plein âge d'or. Mais les relations se dégradent et l'Egypte s'infiltre au sud. En 1275, le roi de Dongola est coopté avec les Mamelouks égyptiens. En 1323, le nouveau roi est un musulman et les églises sont, un peu partout, converties en mosquées.
L'islam reste d'abord présent en Nubie et sur la mer Rouge. Le vieux royaume d'Alodie, centré sur l'actuelle Gezira et proche de l'Ethiopie, est lui toujours chrétien et le reste d'une certaine manière jusqu'à sa disparition définitive au tout début du XVIe siècle. Une nouvelle tribu nilotique impose ensuite son autorité sur les ruines de l'ancien royaume : les Founj, venant probablement du centre ou du sud du Soudan. Ils repoussent les armées arabes mais laissent les sheikhs musulmans répandre l'islam. En 1504, leur chef (le Mek), Amara Dunqas, fonde un sultanat, rapidement islamisé, à Sennar sur le Nil Bleu, surnommé comme il se doit le sultanat "Bleu". Cet Etat féodal, formé d'une confédération de pouvoirs locaux prêtant allégeance au souverain, doit développer une armée forte pour conserver son autorité. La contrepartie de ce processus est la perte de pouvoir du souverain au profit de ses chefs militaires. Le coeur de l'armée est formé par les esclaves, également principale ressource économique du sultanat. Malgré des tentatives avortées de reconquête du pouvoir royal, le sultan finira par n'occuper qu'un poste honorifique.
Cela étant, les Founj étendent leur domination vers les monts Nuba, en assimilant le royaume de Tegali et la Nubie. A la même époque, le Darfour s'islamise et c'est de là qu'un sultanat Four concurrent dispute le Kordofan aux Founj. Au sud, le royaume Shilluk, partenaire commercial, est aussi un adversaire du pouvoir à Sennar, tout comme l'Ethiopie voisine. Les pressions migratoires et guerrières des Dinka et des Equatoriens vers le nord obligent les Shilluk à conclure régulièrement des trêves avec les Founj, et des brassages ethniques s'opèrent. Au nord et à l'est sur la mer Rouge, l'Empire ottoman entreprend de soigneusement contrôler les réseaux commerciaux et les centres névralgiques. A la fin du XVIIIe siècle, lorsque James Bruce, découvreur européen de la source du Nil Bleu, traverse le sultanat, celui-ci est déjà en phase de déclin avancé.
Dans les années 1820, c'est un khédive ambitieux qui règne au Caire. Dépendant officiellement de la tutelle de la Sublime Porte à Istanbul, Méhémet-Ali cherche à s'en départir en défiant le pouvoir ottoman ou en étendant les territoires sous son contrôle. Il entreprend, entre autres, de conquérir le Soudan et place l'un de ses fils, Ismaïl, à la tête d'une armée moderne. Sous le prétexte de la présence de Mamelouks en Nubie, celle-ci pénètre avec une grande facilité dans un territoire resté en marge du développement durant de longues années. Malgré l'épisode de la mort d'Ismaïl, tué par Mek Nimir (voir "Figures historiques"), les Egyptiens (ou plutôt les "Turco"-Egyptiens) balaient rapidement les dernières miettes du pouvoir des Founj, qui se rendent, inaugurant ce qui est connu au Soudan comme l'ère de la Turkiyah, bien que les Turcs aient désormais bien peu à voir à l'affaire. A cette époque sont fondées des villes comme Kassala et surtout Khartoum, qui devient vite le nouveau siège du pouvoir central. L'Egypte s'implante jusque dans le Kordofan et les monts Nuba, avant de pénétrer plus au sud avec l'aide des Anglais, lesquels sont aussi soucieux d'être proches des Egyptiens que de trouver les sources du Nil et s'approprier de nouvelles richesses, comme l'ivoire. Au milieu du XIXe siècle, la région de l'Equatoria, aujourd'hui située à l'extrême sud du Soudan, est atteinte au niveau de la limite de navigabilité du Nil Blanc, qui se couvre petit à petit de bateaux à vapeur. C'est le temps des mercenaires et des explorateurs européens au Soudan, comme Samuel Baker, et le début de l'ère coloniale qui bouleverse la vision des peuples locaux dans le sud du Soudan. Nord et sud du Soudan moderne sont, pour la première fois, formellement reliés sous une même autorité. Seul le Darfour conserve une large autonomie.
Mais la domination étrangère du Soudan prospère sur le commerce des esclaves, monopole d'Etat qui semble être au final la seule raison de la présence égyptienne sur place. La traite atteint une dimension industrielle et attire nombre d'individus, comme l'aventurier Zubeir Pacha, et de tribus, dont les Baggara, dans les lucratives activités de capture et de commerce d'esclaves. Les révoltes sont nombreuses contre le système de taxation qui ponctionne les richesses de la région sans aucun retour. Le petit-fils de Méhémet-Ali, le khédive Ismaïl Pacha, réduit la voilure en nommant le pragmatique Ali Khorshid Agha gouverneur du Soudan, alors que les Anglais appellent également à l'abolition de l'esclavage dans la région. Le Caire étend brièvement son autorité au Darfour, dans les années 1875, mais finit par faire face à une révolte aux raisons partiellement inverses des précédentes. Car la fin du commerce esclavagiste plonge des milliers de tribus soudanaises dans la misère. Le pouvoir égyptien s'effrite au Soudan, après la mort d'Ismaïl en 1879, au profit de la Couronne anglaise. Et pour la première fois, un rejet de l'étranger va fédérer la région au-delà des clivages ethniques et tribaux soudanais.
Depuis l'île d'Aba au nord de Kosti, le charismatique Mohammed Ahmed (voir "Figures historiques") se proclame le "Mahdi", le Sauveur de la religion musulmane, et, en 1881, appelle à la rébellion contre l'autorité turco-égyptienne impie. D'abord marginale, son audience va être considérablement agrandie à la suite de victoires contre l'occupant, d'abord à Aba, puis près d'El-Obeid dans le Kordofan, qui sera l'une des premières régions à se rallier à la cause mahdiste. Les tribus Baggara, puis celles du Darfour et de l'Est rejoignent la révolte. Affolés, les Britanniques réintroduisent en 1884, à Khartoum, Charles Gordon, héros colonial et ancien gouverneur au Soudan. Celui-ci, face à l'avancée mahdiste, se résout à transformer la capitale en forteresse, avant qu'elle ne soit assiégiée par les Ansars, les partisans du Mahdi ("ceux qui suivent"). Londres envoie par voie fluviale de tardifs renforts, qui subissent de lourdes pertes et sont trop ralentis en chemin. Fin janvier 1885, Khartoum tombe aux mains des mahdistes et Gordon est tué sans avoir reçu les renforts à temps. Ceux-ci sont alors piteusement rapatriés, alors que les Anglais viennent de perdre le contrôle du Soudan.
Le Mahdi meurt peu de temps après la prise de Khartoum. La gestion du Soudan revient donc à son successeur, le Khalifa, issu d'une tribu Baggara. Depuis Omdurman, sacrée nouvelle capitale, les anciens rebelles sont confrontés à la réalité étatique. Les taxes sont maintenues, mais l'argent est partiellement accaparé par les tribus Baggara qui ne sont pas imposées. L'unité d'hier se fissure à mesure que le nouveau régime échoue à étendre plus avant son autorité. Le projet de prise de La Mecque et de Médine est abandonné. Les combats contre les Egyptiens et les Ethiopiens s'enlisent. Le Sud est ouvertement hostile à Khartoum et le vide politique laissé par les Anglo-Egyptiens incite les Belges et leur roi Léopold II, ainsi que les Français, à s'y implanter. Les premiers revendiquent un accès au Nil et obtiennent, jusqu'en 1910, une enclave en Equatoria. Les seconds lorgnent aussi sur le fleuve, via le Bahr el-Ghazal. La France envoie sur le tard la mission Marchand, autant pour explorer que pour voir ce qu'il est possible de s'attribuer au Soudan.
Le bouillonnement colonial en Europe concernant le partage de l'Afrique convainc Londres de venger la mort de Gordon en reprenant la main au Soudan et dans le bassin du Nil, en 1896. Par l'Egypte, Lord Kitchener reprend une à une les villes soudanaises le long du Nil, en construisant des lignes de chemin de fer derrière lui. Après Dongola et Atbara, la route de Khartoum est ouverte et Omdurman est soumise en septembre 1898. Kitchener poursuit les derniers partisans du régime effondré et remonte le Nil jusqu'à Fachoda, où il trouve la mission Marchand. Après quelques bruits de bottes, la France renonce au Soudan et la Grande-Bretagne redevient maîtresse du bassin du Nil.
La reconquête anglaise s'est effectuée avec l'appui logistique de l'Egypte. Londres s'entend donc avec Le Caire pour placer le Soudan sous un régime de condominium original, dans lequel la Couronne britannique garde la réalité du pouvoir. La situation reste instable. La guérilla mahdiste dure encore plusieurs années et le Sud est le théâtre de nombreuses révoltes. Le Darfour reprend son indépendance jusqu'en 1916. Mais les Anglais modernisent l'Etat et ses institutions. Un code de lois et un système fiscal sont élaborés. La première école supérieure du pays, le Gordon Memorial College, ouvre à Khartoum dès 1902. A la suite des travaux de l'Américain George Andrew Reisner, les missions archéologiques étrangères commencent à enfin faire connaître en Europe les richesses de la Nubie antique. La culture du coton est industrialisée et la région de la Gezira fait l'objet d'un ambitieux programme d'irrigation à partir des années 1920.
En parallèle, les tensions politiques s'accroissent. Les Egyptiens revendiquent leurs droits historiques et leur proximité culturelle avec le Soudan, qu'ils considèrent très largement comme une "arrière-cour". Leurs ambitions sont contrariées par les Britanniques qui craignent une mainmise de l'Egypte sur le Nil. Les pressions nationalistes en aval du fleuve conduisent l'Egypte sur la route de l'indépendance, obtenue partiellement en 1922. Les années suivantes, la fièvre nationaliste contamine le Soudan et les mouvements revendicatifs favorables à l'union avec l'Egypte, à l'image de la White Flag League, se multiplient. En 1924, le gouverneur général du Soudan, Sir Lee Stack, est assassiné au Caire. Les Anglais s'allient alors à leurs anciens ennemis mahdistes, nationalistes soudanais hostiles à l'Egypte. Les Ansars s'opposent aux partisans de la confrérie Khatmiyah, pro-unionistes.
Le sud du Soudan relève de la compétence exclusive de Londres, qui le coupe de l'influence arabo-musulmane en espérant favoriser l'émergence d'une élite locale. Cette politique de "closed areas" (zones fermées) se termine en 1947, lorsque les Anglais donnent au Soudan ses frontières actuelles en ouvrant le Sud à la domination de l'élite nordiste. L'Egypte devient, elle, indépendante en 1936, mais la question du devenir du Soudan est sans cesse reportée. En 1951, le roi Farouk met unilatéralement fin au régime du condominium et proclame l'unité du bassin du Nil sous son autorité. L'année suivante, la monarchie est renversée par les Officiers Libres, menés par Mohammed Naguib (bien qu'étant né et ayant grandi au Soudan, il devient le premier président de la république d'Egypte) et Gamal Abdel Nasser. En 1953, les mahdistes et la Khatmiyah sont écartés du pouvoir et Ismaïl al-Azhari, leader de la confrérie Ismaïliyah et du National Unionist Party (NUP), aux positions moins tranchées que ses adversaires, devient Premier ministre. L'hostilité des Soudanais à Nasser est exploitée par Londres pour accélérer l'indépendance d'un pays dans lequel violences politiques et ethniques s'enveniment. Après un vote unanime du Parlement national, la république du Soudan devient indépendante le 1er janvier 1956.
Le royaume antique de Koush
2500-1520 av. J.-C. > Royaume koushite de Kerma.
1520-1100 av. J.-C. > Domination égyptienne de la Nubie.
760-747 av. J.-C. > Règne de Kashta, roi de Koush et proclamé pharaon après sa conquête de la Haute-Egypte.
760-656 av. J.-C. > XXVe dynastie égyptienne, dite des "Pharaons Noirs".
690-664 av. J.-C. > Règne de Taharqa.
590 av. J.-C. > Sac de Napata par les Egyptiens.
IIIe siècle av. J.-C. > Déplacement de la capitale koushite à Méroé.
Ier siècle av. J.-C. - IIe siècle apr. J.-C > Domination romaine de l'Egypte. Exploration de la vallée du haut Nil par les Romains.
350 apr. J.-C. > Pillage de Méroé par les Ethiopiens du royaume d'Axoum.
Du Soudan chrétien au Soudan musulman
VIe siècle > Premiers royaumes chrétiens au Soudan.
VIIe siècle > Islamisation de l'Egypte.
1323 > Conversion du royaume de Makourie à l'islam.
1484 > Fondation du sultanat Founj de Sennar.
1517 > Les Ottomans prennent le contrôle de la côte soudanaise.
La domination anglo-égyptienne
1821 > Fin du sultanat de Sennar. L'Egypte de Mohamed-Ali annexe la Gezira et le Kordofan.
1824 > Fondation de Khartoum.
1885 > Prise de Khartoum par les armées mahdistes. Fondation d'Omdurman.
1898 > Fin de l'Etat mahdiste. Crise de Fachoda entre la France et l'Angleterre.
1899 > Mise en place du condominium anglo-égyptien sur le Soudan.
1916 > Fin du sultanat du Darfour, intégré dans le condominium.
1947 > Conférence de Juba. Le Soudan obtient ses frontières actuelles. Le Sud est uni au Nord et ouvert à son influence.
1951 > Le roi égyptien Farouk se proclame souverain de l'Egypte et du Soudan.
1953 > Accord sur l'autodétermination du Soudan entre l'Egypte de Nasser et le Royaume-Uni.
Le Soudan indépendant
1956 > Indépendance de la république du Soudan. Début de la guerre civile dans le Sud.
1958 > Coup d'Etat du général Abboud.
1969 > Coup d'Etat du général Nimeiry.
1970 > Mise en eau du lac Nasser. Des milliers de Nubiens sont forcés de quitter leurs villages.
1972 > Accord d'Addis-Abeba mettant fin à la guerre civile.
1978 > Découverte de gisements de pétrole.
1983 > Application de la sharia dans le pays. Reprise de la rébellion dans le Sud.
1985 > Fin du régime Nimeiry.
1986 > Premières élections générales multipartites. Sadiq al-Mahdi devient Premier Ministre.
1989 > Coup d'Etat du général Al-Bashir.
1997 > Les Etats-Unis placent le Soudan sous embargo.
1999 > Premières exportations de pétrole.
2003-2004 > Massacres au Darfour.
2005 > Signature du Comprehensive Peace Agreement (CPA) entre Khartoum et la rébellion sudiste.
2009 > Inculpation du président Omar al-Bashir par la Cour pénale internationale. Inauguration du grand barrage de Merowe.
2010 > Elections présidentielles, législatives et provinciales.
2011 > Référendum d'autodétermination au Sud-Soudan.
Le Soudan obtient son émancipation dans la douleur. Une fois n'est pas coutume, les bras politiques des deux principales confréries du pays (l'Umma mahdiste et le People's Democratic Party (PDP)) s'entendent pour faire tomber le gouvernement. Al-Azhari est poussé vers la sortie, mais les partis politiques se déchirent pour le contrôle du nouveau pays. La guerre civile couve dans le Sud à la suite de massacres de populations. Les réfugiés qui fuient les violences gagnent les pays voisins comme l'Ouganda. La situation s'aggrave un peu plus avec l'arrivée au pouvoir à Khartoum du pro-arabe général Abboud, par un coup d'Etat en 1958. Les rebelles s'organisent et créent, en 1962, sous l'égide de Joseph Lagu, le mouvement Anyanya, du nom d'un poison local. Ils obtiennent des soutiens à l'étranger, notamment en Israël et en Ethiopie où la rébellion érythréenne est d'ailleurs soutenue par Khartoum. La politique discriminatoire et idéologique d'Abboud échoue à susciter l'adhésion de la population, enfoncée dans la pauvreté. Une révolution d'Octobre en 1964, portée par les étudiants et les ouvriers, ouvre la voie au retour à un gouvernement civil lors de nouvelles élections l'année suivante. L'arrière-petit-fils du Mahdi, Sadiq al-Mahdi, devient Premier Ministre à l'issue de lourdes tractations politiques entre le DUP, l'Umma et les Frères Musulmans. Cette période se caractérise pourtant par la perpétuation du conflit sudiste et l'essor de la corruption. Affaibli, le gouvernement est balayé par un nouveau coup d'Etat en 1969, mené par le général Jaafar al-Nimeyri.
Le nouveau dirigeant du pays se veut un émule de Nasser. Son mouvement des Officiers Libres s'inspire des idées socialistes et rapproche le Soudan du bloc de l'Est. Mais une tentative de coup d'Etat communiste convainc Nimeyri de ne pas trop s'éloigner des Américains. En 1971, il entreprend des pourparlers avec la rébellion sudiste, pourparlers qui parviennent, en 1973, aux accords d'Addis-Abeba. Ceux-ci prévoient une large autonomie et une minorité de blocage au sein du Parlement national pour le Sud-Soudan. Les accords amenent la paix pour la première fois dans le pays depuis son indépendance. Dans le même temps, les perspectives d'union du Soudan à l'Egypte et à la Libye, réclamée par Nasser et le jeune colonel Qaddhafi, s'évanouissent définitivement.
A partir de là, les années 1970 sont l'occasion d'entreprendre de grands travaux d'aménagement du territoire et des réformes sociales. Mais les fonds manquent, de même que la volonté politique, provoquant une crise économique favorable aux mouvements extrémistes. La découverte du pétrole, en 1978, dans le sud du pays, et les divisions au sein du mouvement indépendantiste dans le Sud, avec la création du Sudan People's Liberation Movement/Army (SPLM/A) de John Garang, décident le gouvernement de Khartoum à diviser le Sud-Soudan en trois provinces, au début des années 1980. Le Parlement de Juba est suspendu et les hostilités armées reprennent finalement en 1983, à la suite du projet de Nimeyri d'appliquer la sharia sur l'ensemble du territoire soudanais. La dégradation de la situation dans le Sud et les protestations dans le Nord achèvent de décrédibiliser le gouvernement, finalement renversé par les militaires en 1985.
La junte déclare alors préparer le retour à un gouvernement civil pour l'année suivante. A l'occasion des élections de 1986, Sadiq al-Mahdi retrouve son siège de Premier Ministre. S'appuyant sur les franges islamistes et pro-arabes du spectre politique, il s'aliène à nouveau les Sud-Soudanais, qui mènent de violents combats contre les milices progouvernementales, notamment dans le Kordofan. Une sécheresse exceptionnelle, en 1988, condamne un gouvernement encore très fragilisé à faire face à un mécontentement croissant dans le pays. Le contexte politique se focalise alors sur la question de l'application de la sharia, contestée dans le Sud et réclamée par l'aile dure du pouvoir à Khartoum.
C'est finalement un nouveau coup d'Etat qui met tout le monde d'accord, le 30 juin 1989. Le général Omar al-Bashir prend la tête du National Islamic Front inspiré par le patron des islamistes soudanais, Hassan Tourabi, pour renverser le gouvernement de Sadiq al-Mahdi, immédiatement placé en détention. Malgré la confirmation de la sharia, le coup suscite le soulagement au sein de la population avec la fin des querelles politiques et la restauration de la stabilité de l'Etat soudanais.
Cependant, l'orientation politico-religieuse du nouveau gouvernement le pénalise rapidement sur la scène internationale. La guerre froide est finie et ce sont des Américains hégémoniques qui imposent l'isolement autour du Soudan après la guerre du Golfe, en raison du soutien de Khartoum à Saddam Hussein. Les Soudanais se retrouvent accusés d'héberger des terroristes, dont Oussama Ben Laden et des membres du Hamas palestinien, et de servir de base arrière à des actions armées dans la région. En 1995, le Soudan est accusé par l'Egypte d'avoir abrité les terroristes qui ont tenté de tuer le président Moubarak lors d'un sommet à Addis-Abeba. Deux ans plus tard, les Etats-Unis de Bill Clinton imposent un embargo sévère sur le Soudan. En 1998, en représailles des attentats contre les ambassades américaines au Kenya et en Tanzanie, soupçonnés d'avoir été planifiés depuis le Soudan, les Américains bombardent une usine à Khartoum-Nord, faisant plusieurs morts. Décrite comme une fabrique d'armes chimiques, l'usine d'El-Shifa (" la guérison ") produisait pourtant bien des médicaments.
Afin d'adoucir la position de la communauté internationale à son endroit et les sanctions commerciales qui en découlent, le Soudan veut faire amende honorable, d'abord en livrant le terroriste sud-américain Carlos à la France, puis en expulsant Ben Laden de son territoire, en 1996. A l'intérieur, le pouvoir entreprend d'écarter Tourabi en le plaçant en résidence surveillée en 2001, puis obtient un cessez-le-feu et signe un mémorandum d'entente avec la rébellion sudiste l'année suivante, le Protocole de Machakos. Il faut dire que le pays entend capitaliser sur ses exportations de pétrole, entamées en 1999, pour s'ouvrir à l'étranger. Les attentats du 11-Septembre lui apportent une occasion de montrer sa bonne volonté en coopérant avec les Etats-Unis contre le terrorisme.
En 2003, les pourparlers s'accélèrent avec le SPLM au Kenya. Mais la situation commence à dégénérer au Darfour. Des massacres de populations jettent des dizaines de milliers de réfugiés sur les routes et dans les camps. Soucieuse de ne pas empêcher la conclusion de la paix entre Nord et Sud, la communauté internationale sera rétrospectivement accusée d'avoir sciemment tardé à réagir face à l'ampleur des violences. En 2005, le gouvernement de Khartoum et le principal mouvement rebelle sudiste signent finalement l'Accord de Paix Global (ACP ; ou Comprehensive Peace Agreement (CPA)), qui prévoit une période de transition politique de 6 ans, censée permettre soit la réconciliation nationale, soit la séparation à l'issue d'un référendum d'autodétermination au Sud-Soudan. Malheureusement, le charismatique et populaire John Garang se tue dans un accident d'hélicoptère. Il est remplacé par l'un de ses bras droits, Salva Kiir, à la vice-présidence de la République et à la présidence du gouvernement autonome du Sud-Soudan.
Mais la situation s'enlise au Darfour et la communauté internationale augmente la pression sur Khartoum. En 2009, la Cour pénale internationale (CPI) décide d'inculper le président Omar al-Bashir, ainsi que deux autres officiels soudanais, pour crimes de guerre et crimes contre l'Humanité au Darfour, chefs d'accusations plus tard complétées par celle de génocide l'année suivante. Les espoirs de paix et de stabilité se raccrochent alors aux élections générales d'avril 2010, dénoncées pour leur manque de préparation et le nombre de questions non réglées, notamment concernant la définition du corps électoral dans les 25 Etats du pays vu le nombre élevé de déplacés internes. Résultat, l'opposition se retire partiellement du scrutin qui voit la réélection du président dès le premier tour avec 68 % des voix. Le clivage Nord-Sud est largement maintenu, avec de victoires significatives pour le National Congress Party (NCP) au pouvoir dans le Nord et du SPLM dans le Sud. Les partis traditionnels, datant de l'époque de l'indépendance, sont laminés. Salva Kiir est, lui, réélu à 93 % des voix à la tête du Sud-Soudan.
Les regards se tournent alors vers l'échéance référendaire, qui doit avoir lieu le 9 janvier 2011 au Sud-Soudan. Abyei, zone litigieuse riche en pétrole, doit aussi se prononcer sur son appartenance au Nord ou au Sud. Alors que la scission du pays semble inéluctable, les Occidentaux sont accusés de favoriser la séparation en se focalisant sur le Sud qui, par exemple, n'est plus soumis aux mêmes restrictions internationales que le Nord. La crainte majeure est que le résultat du référendum ne soit pas crédible, ou simplement ne soit pas reconnu par Khartoum, et qu'il n'entame un nouveau cycle de violences au Soudan. Une perspective qui n'arrangerait personne, ni dans le Nord, ni dans le Sud, ni à l'étranger.
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