Guide Turkmenistan : Mode de vie

L'opposition historique entre nomades des steppes et déserts et sédentaires des oasis d'Asie centrale reste sensible dans les nuances de modes de vie qui distinguent les différentes populations de la zone. Et si les traditions gardent de nombreux points communs, les grands traits sociaux varient aujourd'hui d'autant plus qu'ils sont influencés par les situations politiques et économiques propres à chacun des pays.

Clans et politique au Turkménistan

" Le président du Turkménistan assure la stabilité de son pouvoir en nommant aux postes sensibles qui concernent la sécurité nationale, l'intérieur, en réalité tous les postes qui disposent des forces armées, des hommes qui appartiennent à son clan, Téké, ou qui lui sont entièrement dévoués. Nombre de hauts dignitaires proviennent du même village, d'où est originaire le président, le village de Kipgap, situé non loin de la capitale turkmène, dans le Vilayat d'Ahal. Niazov est le premier dirigeant au plus haut niveau à provenir du Vilayat d'Ahal durant toute l'époque soviétique.

Les nominations politiques de premier plan obéissent à une pondération selon les tribus. Les ministres reflètent la palette des tribus qui composent le Turkménistan dans un choix équilibré qui est reconduit à chaque changement de titulaires. Représentation en trompe-l'oeil, l'équilibre est rompu au sein des ministères. Les proches collaborateurs des ministres sont recrutés dans l'ethnie du président, parmi ses proches. Ainsi, les grands officiers du KGB et de l'armée sont tékés. "

Patrick Karam, Asie centrale, Le nouveau grand jeu, éd. L'Harmattan.

Clans

L'appartenance à un clan est un élément déterminant de la société en Asie centrale. Au Tadjikistan, le clan est " régional " : il y a ceux de Kouliab, ceux de Léninabad... Les alliances politiques et commerciales découlent de cette appartenance. En Ouzbékistan, le clan est familial - il dépend aussi du makhala, le quartier d'où l'on vient - et religieux ; les confréries soufis y sont toujours restées très puissantes. Au Kirghizistan, les castes nomades dirigent toute la vie politique, économique et quotidienne comme avant l'arrivée des communistes. Quand le membre d'une famille noble devient ministre, chef d'une administration ou directeur d'une usine, les membres de sa famille élargie investiront le nouveau territoire ainsi offert et en prendront tous les postes de fonctionnement. Au Turkménistan, les clans sont les lointains héritiers des différentes tribus turkmènes, souvent liées à une zone géographique. Celles-ci étaient identifiées par des dialectes et pratiques vestimentaires distincts, que l'on retrouve aujourd'hui encore. Les liens " tribaux " n'ont été que faiblement entamés par la période soviétique : les fermes d'État et entités collectives étaient alors souvent constituées des membres d'un même clan.

Enfin, au Kazakhstan, l'appartenance à l'une des trois hordes traditionnelles, liée à l'origine géographique, a joué un rôle tout au long de l'histoire du XXe siècle. Les membres des hordes, petite et moyenne, vivant au nord et à l'est du pays, ont été colonisés très tôt : les enfants de la noblesse ont fait leurs études dans les universités russes et sont ensuite revenus au Kazakhstan où ils ont nourri les rangs des premiers nationalistes kazakhs. Leurs enfants ont à leur tour subi les purges de Staline dans les années 1930. Les membres de la grande horde, issus du sud du pays, ont en revanche été mis en contact bien plus tard avec la domination russe, et ont plutôt été formés dans les rangs soviétiques. Ce sont eux que l'on a retrouvés à la tête du parti communiste kazakh au temps des bolcheviks. Nazarbayev est ainsi membre de la grande horde. À l'heure actuelle, l'appartenance clanique continue à jouer un rôle dans la politique et l'économie du pays, et notamment dans les liens avec la Russie. Plus proches géographiquement de la Russie, les membres des petite et moyenne hordes favorisent les échanges avec leur voisin du nord, alors que ceux de la grande horde les considèrent avec davantage de circonspection.

Éducation

Le système éducatif soviétique, imposé dans toutes les républiques socialistes d'Asie centrale, avait permis une alphabétisation presque universelle des populations locales. La tâche avait parfois été ardue, certains des pays présentant à l'origine des taux d'alphabétisation extrêmement faibles : ils n'étaient par exemple que de 4 % pour les hommes et 0,1 % pour les femmes au Tadjikistan en 1920.

La fin de l'Union soviétique et l'indépendance ont contraint les nouveaux pays d'Asie centrale à prendre en charge leur propre système éducatif. La transition a souvent été difficile, faute de moyens financiers et humains : les enseignants sont généralement très mal payés, les écoles en piètre état, les manuels insuffisants et mal adaptés. Au Kirghizistan, 8 000 enseignants ont démissionné en 1992 : leurs salaires ne leur permettaient plus de subvenir à leurs besoins. Un an plus tard, ils étaient 30 000, soit un septième du corps professoral, à faire de même au Kazakhstan.

Malgré l'absence de moyens financiers, presque tous les pays d'Asie centrale ont tenté de lancer de vastes réformes de leur système éducatif. Toutes vont dans une même direction : la renationalisation de l'enseignement. Cette tendance est particulièrement marquée au Turkménistan. La langue turkmène est devenue la langue exclusive de l'enseignement, et le russe a même été relégué au rang de troisième langue derrière l'anglais. Les cursus scolaires ont été modifiés pour inclure des cours de conduite sociale et morale, ainsi que de longues heures (18h sur une semaine de 35h de cours au collège !) consacrées à l'étude du " Ruhnama ", véritable réécriture de l'histoire turkmène. L'école modelée par le Turkmenbashi doit avant tout promouvoir les traditions et le retour aux valeurs spirituelles nationales, au détriment des sciences dures comme les mathématiques et la physique. L'école est obligatoire pendant neuf ans, et le cursus universitaire a été réduit de quatre à deux ans, devenant en même temps plus sélectif : alors que 40 000 étudiants obtenaient tous les ans un diplôme d'université au début des années 1990, ils ne sont plus que 3 500 aujourd'hui. Il n'en reste pas moins que le système éducatif turkmène est devenu un véritable instrument de formatage des populations selon les critères dictés par Niazov. Une tactique à l'efficacité redoutable dans un pays où 40 % de la population a moins de 14 ans...

Les autres pays de la région ont également imposé leur langue nationale comme seule langue de l'enseignement public. Cette décision a accentué le manque d'enseignants qualifiés et de manuels scolaires : le russe avait été jusqu'à présent la langue principale de tout le système éducatif. L'une des conséquences de cette politique linguistique est une discrimination contre les Russes qui, dans la plupart des cas, ne maîtrisent pas les langues de leur pays de résidence. Ce problème est particulièrement sensible au Kazakhstan, où la population russe reste très nombreuse. Les jeunes Russes sont désormais contraints de partir étudier à l'étranger (mais le coût est souvent prohibitif), d'intégrer des établissements privés au Kazakhstan (ce qui pose un problème de reconnaissance des diplômes), voire de renoncer totalement aux études supérieures, faute d'institutions adaptées à leurs compétences linguistiques. La discrimination linguistique s'est également fait sentir en Ouzbékistan, qui a adopté la même stratégie de revalorisation nationale : ainsi l'université de Samarkand a brièvement été fermée au milieu des années 1990, car les cours y étaient dispensés en tadjik, langue de la population majoritaire de la ville.

De façon générale, à l'heure actuelle, l'accès à l'enseignement supérieur reste extrêmement sélectif dans toute l'Asie centrale. On ne peut rentrer à l'université que sur concours, et le nombre de diplômés d'études supérieures dépasse rarement 10 % de la population. Tous les pays reconnaissent en revanche le caractère obligatoire de l'école primaire et secondaire, et le taux d'alphabétisation n'a pas connu de baisse notable depuis la fin de l'époque soviétique, bien que les conditions d'enseignement se soient souvent dégradées.

Habitat

Les habitations varient fortement d'une région à l'autre de l'Asie centrale : aux maisons basses ouvertes sur des cours caractéristiques des oasis peuplées de sédentaires s'opposent les yourtes des nomades du Kirghizistan et du Kazakhstan. Aux maisons des déserts du Karakum ou du Kyzylkum font écho les demeures traditionnelles des montagnes du Pamir. Sans oublier les maisons toute en bois des villages russes au nord du Kazakhstan.

Chid, la maison pamiri. Les maisons traditionnelles des vallées du Pamir, malgré quelques variantes de style, répondent toutes au même principe : celui d'une construction antisismique conçue comme un temple. On retrouve ce même type de maisons dans le nord de l'Inde, du Pakistan et de l'Afghanistan. La pièce centrale est de forme carrée ou rectangulaire, cinq piliers soutiennent une structure de poutres et un toit de bois avec, au centre, une ouverture en escalier appelée " tchorkhona ". Le tchorkhona a quatre " marches " qui symbolisent les quatre éléments. Il éclaire la maison, et laisse partir la fumée du foyer. (Il servait aussi de cadran solaire grâce à l'inclinaison des rayons de soleil qu'il laissait passer.) Trois des côtés de la pièce principale sont bordés de larges " estrades-divans " sur lesquelles on prend les repas, ou qu'on recouvre de matelas pour dormir. Dans l'une d'elles est placé le foyer. La poutre soutenant l'entrée est la plus importante, elle est souvent décorée de motifs symbolisant le soleil. Une ancienne coutume voulait que si quelqu'un avait une demande exceptionnelle à faire il se plaçait sous ce linteau, sans passer le pas de la porte, et ne bougeait pas tant que le maître de maison ne lui avait pas fait le serment d'accéder à sa demande. On ne procédait ainsi que pour des raisons extrêmement graves et rarissimes. Les cinq piliers symbolisent les cinq déités aryennes, les Ameshapent : Surush, Mehr, Ardbon, Zamyod et Ozar ; après l'arrivée des ismaéliens, ils ont été renommés Ali, Mahomet, Fatima, Hassan et Hussein.

Le nombre des poutres secondaires est égal au nombre d'imams, ce qui permet de dater la maison. C'est le plus jeune fils de la famille qui hérite de la maison et qui s'occupe des parents âgés ; si la famille n'a pas de fils, c'est alors la fille aînée qui héritera de leur demeure. Le toit de la maison est plat, on y fait sécher le foin. Les murs en pisé blanchi ne sont d'habitude percés d'aucune fenêtre. On accède à la pièce principale par une pièce vestibule qui possède aussi une estrade-divan.

Yourtes des Tianshan et des steppes kazakhes. La yourte est à elle seule un concentré de toutes les traditions nomades, que l'on retrouve en Mongolie, au Kazakhstan et au Kirghizistan. C'est un habitat extrêmement codifié, qui reflète à la fois la conception de l'univers, et les pratiques sociales.

D'une superficie d'environ 20 m², la yourte est simplement composée de couches de feutre en laine de mouton, posées sur une armature en bois pliable. Son installation prend environ deux heures et se déroule de la façon suivante : on pose d'abord le plancher, quand il y en a un, et tous les meubles sont installés à la place qui leur est attribuée. Vient ensuite le montage du treillis de bois qui forme les côtés de l'habitation, ainsi que la mise en place du chambranle de la porte. Les hommes fixent alors le cercle de bois qui se trouve au sommet de la yourte, posé sur les deux piliers centraux et relié à l'armature en bois. Les perches du toit sont traditionnellement au nombre de 81 (perches et treillis), un nombre faste dans la cosmologie mongole qui s'est transmise aux nomades de toute la région. L'armature mise en place, on peut maintenant installer le tissu intérieur sur les murs (dans les familles les plus aisées), puis les différentes couches de feutre et enfin la toile blanche extérieure, maintenue par de lourdes cordes. L'ouverture centrale est également dotée d'un petit capuchon, qui sera ouvert ou fermé selon les conditions climatiques.

La yourte est une représentation en miniature de l'univers. L'orifice rond au sommet de l'habitation symbolise le ciel, et c'est tout naturellement que le foyer se trouve juste en dessous. Les deux poteaux de bois qui relient le foyer au ciel sont les éléments les plus sacrés de la yourte : il ne faut jamais passer entre ces deux piliers, ni y faire passer des objets. Traditionnellement ouverte vers le sud, la yourte combine répartitions géographique et fonctionnelle. Le nord est la place sacrée : c'est là que se trouvent l'autel des ancêtres et les objets les plus précieux de la famille. Le sud est la zone de travail, celle où se trouve le foyer et où les femmes s'activent pour préparer les repas ou les réserves alimentaires de la famille. De même, l'ouest est réservé aux hommes et aux invités, alors que l'est est celui des femmes et de la vie domestique. Un hôte sera donc installé à l'ouest, et plus ou moins proche du fond de la yourte en fonction de son importance.

Femmes du Tadjikistan

" On dit dans notre pays qu'il vaut mieux naître caillou que fille ", confie Gulya en riant. Les femmes non mariées ont du mal à s'intégrer dans la société. Nombre d'entre elles sont prêtes à devenir deuxième, voire troisième épouse plutôt que de rester seule et sans soutien. Pour illustrer le peu de cas que font les hommes de la femme tadjike, Gulya me raconte un événement qui vient de défrayer la chronique dans la région que nous traversons : " Cette région a été privée d'électricité pendant tout l'hiver. Lors d'un déplacement du vice-président, un groupe d'une trentaine de femmes a pris à parti l'homme du gouvernement. Des pierres ont été jetées contre les voitures du convoi. Plusieurs femmes ont été arrêtées. Il fallait verser dix dollars pour les libérer. Eh bien, vois-tu, leurs maris n'ont pas bougé pour les sortir de prison, allant jusqu'à répondre qu'ils pouvaient trouver d'autres femmes pour moins que ça... Tu as là une société machiste où tu rencontreras le courage des femmes. "

Christophe de Ponfilly, Femmes d'Asie Centrale, éd. ARTE Editions / Mille et une nuits.

Parandja

Jusqu'au milieu des années 1920, les femmes d'Ouzbékistan portaient encore la parandja. Cette cape qui les recouvrait entièrement de la tête aux pieds comportait une partie tissée en crin de cheval, ayant la propriété de réfléchir les rayons du soleil. Les femmes devenaient toutes blanches à force de porter cet habit. Dans leur guerre contre l'islam, les soviétiques interdirent le port de la parandja dès 1927. Les femmes réunies dans chaque village jetèrent en masse leur prison de tissu, mais aucune information précise n'ayant suivi cette décision, les hommes en furent partout offusqués. Le changement fut trop brusque et, en Ouzbékistan comme au Tadjikistan, les femmes furent victimes de cet empressement.

Qu'une femme ose apparaître ainsi à visage découvert fut vécu par les membres mâles de sa famille comme une humiliation. Maris, pères et frères tuèrent, lapidèrent ou lynchèrent celles qui avaient eu l'audace de se libérer de leur joug. Nurjan, la plus célèbre des actrices ouzbèkes de l'époque, fut la victime la plus connue de ce retour à l'ordre. La population montra sa tristesse lors d'une manifestation qui eut lieu peu après sa mort à Marguilan. Il fallut quelques années aux soviétiques pour que la suppression du voile soit acceptée partout. Aujourd'hui, le voile refait timidement son retour dans les coins les plus reculés de l'Ouzbékistan, du Tadjikistan et même du Kirghizistan, dans la vallée du Ferghana.

Enjeux sanitaires

Une fois encore, la transition post-indépendance a été difficile à gérer pour les cinq républiques d'Asie centrale. Tous les pays ont dans un premier temps tenté de maintenir en place le système hérité de l'Union soviétique, qui garantissait (en théorie tout du moins) l'accès gratuit et universel aux soins médicaux. Mais les nouveaux États ne disposaient que de budgets extrêmement limités pour rénover leur système de santé, et les infrastructures se sont souvent dégradées, les médecins sont partis à l'étranger (la plupart étaient d'ailleurs russes) ou reconvertis dans d'autres activités plus lucratives. L'approvisionnement en médicaments est rapidement devenu problématique : autrefois dépendants de l'Union soviétique, les hôpitaux ont dû faire face à une pénurie de vaccins et médicaments qui n'étaient pas produits sur place et qu'ils ne pouvaient acheter à l'étranger faute de moyens.

Certains pays, comme l'Ouzbékistan, et dans une moindre mesure le Kirghizistan et le Tadjikistan, explorent la voie d'une privatisation de leur système de santé, couplé avec la création d'une assurance médicale. Mais les réformes sont lentes et chaotiques, ouvrant souvent la porte à la corruption du corps médical, qui trouve ainsi les moyens d'arrondir des fins de mois difficiles.

La dégradation des infrastructures médicales est d'autant plus inquiétante que les pays d'Asie centrale sont fortement touchés par des problèmes sanitaires liés à l'environnement, qui avaient été niés durant la période soviétique mais deviennent incontournables aujourd'hui. La province du Karakapalkstan en Ouzbékistan est particulièrement révélatrice de ces problèmes : la proximité de la mer d'Aral et de ses vents de sel, la présence de produits chimiques dans la terre et l'eau due à l'exploitation du coton affectent les populations locales. L'espérance de vie de cette région n'est que de 38 ans, et le taux de mortalité infantile y atteint 110 ‰ contre 65 ‰ en moyenne nationale. Au Kazakhstan, les mêmes problèmes se posent autour de la mer d'Aral, alors que les habitants de la région de Semey sont toujours victimes des radiations émises lors des essais nucléaires effectués dans le Polygone, et que ceux d'Oust-Kamenogorsk subissent les conséquences de la pollution de l'eau, de la terre et de l'air due aux industries chimiques locales.

Mal équipés pour lutter contre ces problèmes sanitaires spécifiques, les pays d'Asie centrale ont vu la santé de leurs populations se dégrader pendant la transition post-indépendance. La situation la plus inquiétante était alors celle du Kazakhstan : à la suite de la hausse du taux de mortalité et de la baisse de celui de la natalité, la population du pays a diminué pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale.

Mariage

Même en ville et dans les familles les plus occidentalisées, les mariages sont souvent arrangés par les parents. Des alliances familiales sont préparées de longue date, et le statut social et l'appartenance à un clan sont des facteurs plus importants que les affinités entre futurs époux. Ce sont en général les mères des fiancés qui se lancent à la recherche de leur future belle-fille : celle-ci habitera souvent avec les parents de son mari, et certaines familles considèrent que le plus important est que la jeune mariée plaise à ses beaux-parents. Les rencontres sont très codifiées, et impliquent à chaque fois les parents des deux parties. Les mariages donnent lieu à des fêtes fastueuses, et les frais d'installation du jeune couple sont répartis entre les deux familles. Les parents de la fiancée prennent en charge l'ameublement de la nouvelle maison, ceux du fiancé offrent le repas de fête, et parfois la maison ou l'appartement si le fils ne prévoit pas de rester chez ses parents.

Les cas de divorce sont extrêmement rares dans toute l'Asie centrale, où le mariage est une institution très respectée.

Les séparations commencent à apparaître dans les zones urbaines, mais il sera très difficile, voire impossible pour une femme divorcée de se remarier. La polygamie est officiellement interdite dans toute la zone, mais des cas sont cependant recensés, d'autant plus nombreux que la pratique est liée à la religion musulmane, qui autorise jusqu'à trois femmes. Suite à la guerre civile, de nombreuses veuves au Tadjikistan ont accepté d'être deuxième ou troisième épouse, pour éviter la solitude et surtout la mise au ban de la société qui vont de pair avec le statut de femme seule.

Le Kirghizistan présentait une particularité traditionnelle qui refait son apparition depuis la fin de l'Union soviétique. Les jeunes prétendants devaient autrefois enlever la femme qu'ils convoitaient (parfois avec son consentement et sa complicité, parfois sans...), et le mariage devenait une obligation une fois la relation consommée...

La pratique reste marginale aujourd'hui, mais elle est toujours illustrée de façon symbolique lors des mariages : le jeune homme doit en effet " enlever " sa fiancée dans la maison de ses parents, après être venu à bout de la résistance des membres de sa famille qui l'empêchent d'accéder jusqu'à la chambre de la fiancée.

Place des femmes

La position des femmes n'était pas identique dans tous les pays d'Asie centrale avant la période soviétique. Et, bien que les Russes aient tenté de promouvoir l'égalité entre hommes et femmes dans toutes les Républiques, les traditions ont rapidement resurgi après l'indépendance, plus ou moins marquées selon les pays et les pratiques sociales et religieuses.

Le Tadjikistan est probablement le pays d'Asie centrale où les femmes ont la vie la plus difficile. Les politiques d'émancipation mises en place par les Soviétiques ont rencontré une très grande résistance, notamment lorsqu'il s'agissait du port du voile et du travail des femmes. Au milieu des années 1980, la moitié des femmes tadjikes n'avaient pas d'emploi hors de la maison. Et en moyenne, chacune d'entre elle donnait naissance à 8 enfants. Après l'indépendance, les femmes tadjikes ont subi les conséquences du renouveau des pratiques religieuses musulmanes, qui sont parfois allées de pair avec le retour du voile et de la réclusion domestique. À l'issue de la guerre civile, le pays comptait plus de 25 000 veuves, un statut qui laisse les femmes complètement démunies dans une culture où le mariage les rend entièrement dépendantes de leur mari.

En Ouzbékistan, les femmes ont également subi de manière flagrante les changements sociaux amorcés depuis la chute de l'Union soviétique et le retour de l'Islam. Les traditions reviennent en force, notamment en ce qui concerne le mariage, même dans les familles citadines et en apparence plus occidentalisées. Ainsi, une femme mariée en Ouzbékistan ne sort pas seule, et encore moins accompagnée d'amis masculins. Elle est soumise aux décisions de son mari pour tout ce qui concerne son quotidien : droit de travailler, de sortir, et même pour sa tenue vestimentaire ! Les jeunes mariées vivent en outre souvent chez leur belle-famille, où elles se retrouvent au plus bas de l'échelle sociale, d'autant plus soumises à la tyrannie de leur belle-mère qu'elles n'ont pas donné naissance à un fils. Seuls l'âge ou l'éducation religieuse peuvent donner aux femmes un début de rôle familial ou social respecté. La mère de fils peut ainsi exercer son influence sur ses belles-filles. Quant aux otins, qui sont l'équivalent féminin des mollahs, elles ont retrouvé l'influence sociale qu'elles avaient perdue (sauf parfois de manière clandestine) durant l'époque soviétique.

Au Kirghizistan, comme dans les pays issus des cultures nomades, les femmes ont une position généralement plus enviable. Traditionnellement, et bien que l'on soit toujours dans des sociétés patriarcales, les femmes partageaient le travail des hommes avec lesquels elles étaient plus ou moins sur un pied d'égalité au sein de la famille. L'histoire et la littérature du Kirghizistan font par exemple état de plusieurs femmes devenues leaders de leur clan. La littérature orale rapporte ainsi l'histoire de Jamyl-myrza, jeune femme transformée en guerrier pour mener son clan à la libération. Et le XIXe siècle se souvient encore de la fille du khan Almyn-bek, qui a conduit une armée de Kirghiz dans la guérilla contre les Russes lancés à la conquête de Kokand. Aujourd'hui encore, le Kirghizistan est l'un des pays où les femmes sont les plus nombreuses à des postes de responsabilité économique ou politique. Le pays a par exemple eu une femme ministre de l'Éducation ou des Affaires étrangères, ambassadeur aux États-Unis ou au Canada : Roza Otounbaïeva. Elle dirigeait d'ailleurs le "gouvernement par intérim" qui a renversé l'ancien président au moment de l'impression de ce guide (avril 2010).

Le Kazakhstan est en train d'adopter une position un peu plus conservatrice quant au rôle des femmes dans la société. La constitution de 1995 reconnaît implicitement que les femmes ont les mêmes droits que les hommes, mais la pratique sociale continue à assimiler le travail des femmes aux abus de la période soviétique. De fait, très peu de femmes ont accès au Kazakhstan à des postes politiques ou économiques élevés. En avril 1995, le président Nazarbayev déclarait vouloir créer un système économique dans lequel les femmes pourraient travailler à la maison tout en élevant les enfants.

Le pays favorise les familles nombreuses : 15 % des femmes ont au moins sept enfants, et l'on comptabilise une moyenne de cinq avortements par femme ! Les mères de famille ont en outre été les objets de politiques natalistes lancées par les nationalistes kazakhs, qui voulaient mettre fin à la supériorité numérique des Russes en territoire kazakh. Le pays a même brièvement envisagé d'interdire l'avortement et les pratiques contraceptives.

Au Turkménistan, les femmes bénéficient d'une protection légale bien plus développée que dans les autres pays de la région, et leur implication sociale est plus grande. Selon les statistiques officielles du pays (qu'il faut néanmoins prendre avec des pincettes), 85 % des femmes entre 16 et 56 ans ont un emploi. 50 % des médecins, 63 % des enseignants, 62 % des entrepreneurs dans les petites et moyennes structures sont des femmes. Celles-ci représentent également 40 % des étudiants du pays. L'implication des femmes en politique est soulignée par la présence de 30 % de femmes au Conseil du Peuple. Plusieurs ministères, le poste de vice-présidente du parlement, et de nombreux postes dirigeants dans les administrations locales sont également détenus par des femmes. Le pays s'est en outre doté d'une Union des femmes du Turkménistan, qui rassemble près d'un million de membres et vise à promouvoir le rôle des femmes dans la vie politique, sociale et culturelle. Les mères bénéficient également d'une protection sociale relativement développée en théorie : congés de maternité, retraites anticipées si elles ont eu plus de trois enfants, incitations fiscales à l'embauche... Les relations hommes-femmes au sein du couple, bien que légalement considérées comme égalitaires, sont en revanche plus difficiles à évaluer.

Religion

L'Asie centrale, carrefour des civilisations, est également le point de contact de nombreuses religions. Certaines ont aujourd'hui pratiquement disparu, alors que d'autres connaissent un regain de vitalité depuis l'effondrement de l'Union soviétique.

Islam

L'islam, qui semble renaître depuis l'indépendance, ne s'était en fait jamais totalement éteint. Sa répression fut intense de 1932 à la Seconde Guerre mondiale : les musulmans récalcitrants furent envoyés en Sibérie, les mosquées et les madrasas furent transformées en entrepôts ou en fabriques. Mais, dans les années qui suivirent, les mollahs de village purent continuer d'enseigner discrètement le Coran, sans être trop inquiétés.

Depuis 1994, de nombreuses madrasas ont été réhabilitées, et les mosquées rendues au culte dans tous les pays. Aujourd'hui les fêtes religieuses sont à nouveau célébrées, mais les gouvernements sont confrontés à l'émergence d'un islamisme intégriste importé d'Arabie saoudite, le wahhabisme, dont les membres, très influents dans la vallée de Ferghana, ont été rendus responsables des attentats de 1999 visant le président Karimov.

Les tribus türks et mongoles étaient restées fondamentalement animistes, même après leur conversion au bouddhisme ou au nestorianisme. Dans un premier temps, la conversion de leurs khans à l'islam avait dû être assez formelle, encore que les musulmans bénéficiaient d'une aura particulière car leurs missionnaires étaient aussi des guerriers.

L'islam phagocyta les coutumes et les rites des " infidèles ", et sut perdurer, en grande partie grâce au prosélytisme des confréries soufis. Aujourd'hui l'islam d'Asie centrale est majoritairement sunnite, métissé de croyances zoroastriennes, manichéennes, bouddhistes ou animistes, et toujours fortement influencé par les confréries soufis. Le soufi Akhmad Yasavi, qui vécut au XIIe siècle, était le père spirituel de Tamerlan. Il est l'auteur de poésies mystiques, les hikmet, rédigées en turc, la langue du peuple. Très répandu chez les tribus nomades, cet islam était empreint de traditions chamaniques, et s'est aujourd'hui progressivement dilué dans l'islam populaire.

La confrérie soufi, constituée au XIVe siècle par Baha al-din Nakchband, eut un rôle dominant dans la vie religieuse et politique de la Transoxiane. Grands prosélytes, conseillers des khans, les soufis contrôlaient aussi les confédérations d'artisans du bâtiment, charpentiers, céramistes, tailleurs de pierre qui édifièrent les monuments timourides ou chaybanides. Les nakchbandi écrivaient en persan, la langue des érudits, et représentaient un islam savant, celui des sédentaires et des constructeurs. La mystique nakchbandi se fonde sur les paroles sacrées, ou " onze principes ", et enseigne aux membres de la confrérie à mener une vie contemplative tout en conservant leur rôle social.

Ainsi, le principe de " la retraite dans la société " dicte comment " se trouver en apparence avec le monde et en secret avec Dieu ". Les nakchbandi se livrent à la prière silencieuse, seuls ou en groupe. Une pratique sans doute influencée par les mystiques orientales, et qui rappelle les exercices respiratoires du qi gong ou du yoga. Le nakchbandi visualise différents points de son corps, tout en récitant mentalement " il n'y a de dieu que Dieu ", au cours d'une prière répétitive appelée zikr, qu'il accompagne d'exercices respiratoires ponctués d'apnées plus ou moins longues. Il existe différents rituels soufis, comme celui des djahri, dirigés par le cheik Adil Khan, à Andijan, qui pratiquent la prière répétitive et la danse extatique.

Les femmes, qui sont exclues des confréries soufis, sont les plus ferventes pratiquantes du culte des saints. Des nombreux mausolées de missionnaires musulmans ou de cheiks soufis qui se transformaient lentement en poussière, beaucoup sont aujourd'hui restaurés. Comme à La Mecque, les pèlerins font trois fois le tour des tombeaux, mais certains rituels paraissent plus " païens ", comme cette pratique qui consiste à déchirer un morceau de vêtement et à l'accrocher à un arbre en faisant un voeu, à passer en rampant sous l'immense lutrin de Samarkand, à tourner autour du gigantesque chaudron du mausolée de Yasavi, ou encore à poser sa tête sur la pierre noire du mausolée de Nakchband. La prière au saint demande souvent la guérison ou la fertilité. Parfois on peut remarquer un étroit canal creusé dans les anciennes pierres tombales : l'officiant y fait couler de l'eau qui est ainsi censée soigner les mots de gorge.

L’ismaélisme

Les chi'ites, peu nombreux en Asie centrale, sont divisés en deux groupes : les duodécimains, qui reconnaissent douze imams, et les ismaéliens ou chi'ites septimains, qui, grâce à une généalogie alambiquée et toujours discutée, ont continué la lignée des imams jusqu'à l'actuel Aga Khan, leur guide spirituel et 49e imam. Les ismaéliens doivent leur nom à Ismaïl, le sixième imam. Ils sont considérés comme hérétiques autant par les sunnites que par les chi'ites. Il existe une communauté d'ismaéliens au Tadjikistan, dans les vallées du Haut Badakhshan.

Le fondateur présumé de la doctrine ismaélienne, Abd Allah al-Akbar (IXe siècle), enseigna d'abord en Iran, puis en Syrie, où il mourut et fut enterré. Dès le début du Xe siècle, les ismaéliens, dont le but déclaré était le renversement du califat de Bagdad, avaient tissé un réseau clandestin de communautés recouvrant l'ensemble du monde musulman de l'Afrique du Nord jusqu'au Pakistan. En 910, un anticalifat ismaélien fut proclamé en Égypte, dirigé par la dynastie des Fatimides, qui affirmaient descendre d'Ali et de Fatima. Il devait durer jusqu'au début du XIIe siècle. Des missionnaires, souvent déguisés en marchands, étaient envoyés vers les plus lointaines terres et fondaient des jazira, centres régionaux autonomes et clandestins de développement de l'ismaélisme. L'un d'eux englobait les territoires actuels de l'Ouzbékistan, du Tadjikistan et de l'Afghanistan.

La doctrine originelle reconnaissait six prophètes qui avaient révélé à leurs peuples une religion de la Loi divine : Adam, Noé, Abraham, Moïse, Jésus et Mahomet ; et six initiés : Seth, Sem, Isaac, Aaron, Simon-Pierre et Ali. La doctrine professe le retour du mahdi, le septième imam caché, Muhamad, le fils d'Ismaïl, celui qui abolira toutes les religions, même l'islam, et grâce auquel les hommes retrouveront le paradis et la religion primitive d'Adam et Ève, celle d'avant la déchéance des anges. Au Xe siècle, l'érudit iranien Muhammad al Nasafi habilla la théologie ismaélienne de concepts néoplatoniciens. Il vécut à la cour de Boukhara où il convertit à l'ismaélisme le Samanide Nasr ibn Ahmad et plusieurs nobles de sa suite.

Au XIIe siècle, Hassan-e-Sabbah, missionnaire ismaélien au sein de l'Empire seldjoukide, parvint à s'emparer de la forteresse d'Alamut, située dans le massif iranien de l'Elbrouz. La petite principauté d'Alamut devint le centre de la rébellion contre le calife de Bagdad et le sultan seldjoukide. Des groupes terroristes y étaient formés en vue de réaliser des attentats contre les dirigeants politiques et religieux. Ainsi, en 1092, un émissaire ismaélien, déguisé en soufi, réussit à poignarder le vizir seldjoukide Niza-el-Mulk. Ces terroristes prêts au suicide étaient surnommés hashishi, qui signifie utilisateur de hachisch mais pouvait aussi vouloir dire irresponsable. Ce terme passa dans la langue française et donna le mot assassin.

Une autre principauté, fondée en Syrie au milieu du XIIe siècle, organisait des attentats contre les croisés. L'un des princes de cet État, Rashid al-din Sinan, surnommé " le vieux de la montagne " par les croisés, fit assassiner le roi de Jérusalem, Conrad de Monferrat, en 1192. Le dernier imam de la forteresse iranienne d'Alamut capitula devant les mongols en 1256, et, en 1271, la place forte des ismaéliens de Syrie fut conquise par le sultan mamlouk Baybar.

Au XVIe siècle, les communautés ismaéliennes d'Iran furent pourchassées, et seules quelques petites communautés survécurent, dont celles du Badakhchan, dans le Pamir tadjik. Ces ismaéliens du Pamir furent largement influencés par les khodjas du nord-ouest de l'Inde, des marchands hindous convertis à l'ismaélisme au XVe siècle. Les rites de prière des khodjas sont loin de ceux des ismaéliens originels, la mosquée est remplacée par le djamat khona, et la littérature religieuse est imprégnée de légendes hindouistes ou tantriques.

En 1866, le premier Aga Khan, descendant des imams d'Alamut, s'installa en Inde et fit reconnaître son autorité par la High Court de Bombay. Le troisième Aga Khan, né à Karachi, finança de multiples oeuvres sociales en Inde et en Afrique orientale, et attacha une attention particulière à l'éducation des filles qui, chez les khodjas, ne sont pas voilées. Son petit-fils, Karim Aga Khan, le 49e imam, est né à Genève en 1936 ; il vit la plupart du temps à Paris, et continue la politique d'aide au développement et d'éducation de son grand-père.

Zoroastrisme – mazdéisme

Le mazdéisme fut pratiqué par les tribus aryennes qui peuplaient l'Asie centrale occidentale et l'Iran dès le second millénaire avant notre ère. Cette religion polythéiste reconnaissait Ahura Mazda comme le plus puissant des dieux. Ses rites étaient réalisés par des mages qui pratiquaient le culte du feu purificateur et des sacrifices rituels d'animaux.

On connaît très mal la vie de Zarathoustra (de l'iranien Zarathushtra), appelé autrefois Zoroastre (du grec Zôroastrès). Il serait né vers l'an 1000 av. J.-C. En Iran oriental, au Khorezm ou en Sogdiane. Fondateur du zoroastrisme et réformateur du mazdéisme, il s'opposa au sacrifice rituel et au culte de Haoma, le dieu qui donne la force grâce à une boisson enivrante. Voir l'excellent livre de Nietzsche, "Ainsi parlait Zarathoustra" pour plus d'informations...

Le zoroastrisme glorifie le dieu du bien Ahura Mazda, le seigneur sage, et la lutte qui oppose Spenta Manyu, l'Esprit saint, au destructeur Ahriman. Il conçoit l'univers comme la lutte de deux principes, le Bien et le Mal, s'opposant comme le jour et la nuit, le chaud et le froid. Bien que monothéiste, la religion zoroastrienne conserve le panthéon mazdéen, dont les divinités Mithra et Anahita sont les plus célébrées en Asie centrale. Les textes sacrés sont regroupés dans l'Avesta, le livre sacré zoroastrien où se trouvent les gâthâ, les poèmes liturgiques composés par Zoroastre. Ces textes, qui auraient été rédigés en langue avestique au second millénaire avant notre ère, furent longtemps transmis oralement par les mages puis transcrits assez tardivement, sans doute à la fin de l'époque sassanide. Ils furent perdus, et les textes dont on dispose actuellement dateraient du XIIIe siècle.

Le feu, l'eau, l'air et la terre sont des éléments sacrés qu'il ne faut pas souiller. Ainsi les morts ne sont ni enterrés, ni brûlés, ils doivent être exposés dans les dakhma, qui sont parfois des petites constructions appelées " naus ", comme on en retrouva à Penjjikent (Tadjikistan), ou des espaces clos situés sur des collines, comme les " tours du silence " qu'on voit en Iran ou en Karakalpakie (Ouzbékistan). Les ossements les plus importants, où siège l'âme des morts, sont regroupés dans des récipients de terre cuite, les ostéothèques, ou placés dans des espaces clos appelés " ostadan ". Le zoroastrisme fut la religion officielle de la dynastie sassanide ; il fut largement pratiqué en Sogdiane et en Bactriane. Il existe des ruines de temples zoroastriens dans le Pamir tadjik et en Karakalpakie. Cette religion est encore pratiquée en Inde du Nord, ainsi qu'en Iran, où elle est persécutée.

Chamanisme

Les vieilles traditions chamanistes se sont conservées très longtemps chez les nomades et dans les villages de campagne. Les guérisseurs, qui se présentaient comme des cheikhs, étaient plus souvent des chamans que des médecins. Officiellement éradiqués sous le pouvoir communiste, ils resurgissent aujourd'hui avec succès. Appelés " bakshi ", ils guérissent le mal en invoquant les esprits. De nombreuses pratiques chamanistes imprègnent en outre les religions apparues plus tardivement dans la région, et notamment l'islam.

Bouddhisme

Les routes de la soie furent aussi celles de la propagation du bouddhisme. Les marchands furent les premiers convertis, et aussi les premiers missionnaires du bouddhisme. Fondé dans le nord de l'Inde vers le Ve siècle av. J.-C., la religion bouddhique fut introduite en Bactriane dès le IIe siècle av. J.-C., mais ne connut un réel épanouissement que sous l'Empire kouchan. La tolérance de l'empereur Kanishka, qui régna au Ier ou IIe siècle, permit la propagation de cette nouvelle religion, qui rayonna à travers toute l'Asie centrale jusqu'en Chine, où elle devint la religion officielle des empereurs chinois au VIe siècle. Dès le IVe siècle, les pèlerins chinois suivirent les routes commerçantes en direction de l'Asie centrale et de l'Inde, à la recherche des textes orignaux. Le plus célèbre de ces pèlerins est Xuanzang, qui atteindra le saint des saints : l'arbre de l'éveil où Bouddha reçut l'illumination. Après dix ans de voyage (629-639), il retourna à la cour de l'empereur de Chine, chargé de manuscrits, de reliques et de statues.

Le plus grand site bouddhique de Bactriane se trouvait à Bamiyan, en Afghanistan, mais les deux grands bouddhas sculptés ont été dynamités par les Talibans en mars 2001 ; un important monastère fut aussi découvert à Adjina Tepe, dans le sud du Tadjikistan.

Manichéisme

Après l'assassinat de Mani, au IIIe siècle, les nombreux disciples de cette nouvelle religion furent chassés de la Perse sassanide et se réfugièrent en Asie centrale et au Turkestan chinois. La " doctrine des deux principes ", que les chinois appelèrent " religion de la lumière ", s'implanta fortement en Sogdiane, et, au Xe siècle, Samarkand fut la résidence du patriarche manichéen. Les manichéens vénéraient la beauté de la nature, adoraient " tout ce qui à leurs yeux manifeste la Beauté, lumières, eaux courantes, arbres, animaux, parce que dans tout être, dans tout objet beau, la divinité de la lumière a pris demeure ". Le manichéisme est une religion intransigeante qui oppose la matière et l'esprit, et qui professe le célibat, le partage des richesses et l'interdiction de verser le sang. Les plus intégristes refusaient de procréer, de se soigner en cas de maladie ou même de se nourrir. En Europe, ses adeptes, les bogomiles de Bulgarie et les cathares d'Albi, furent aussi impitoyablement pourchassés.

Nestorianisme

Nestorien, évêque de Constantinople, niait l'origine divine du Christ et la sainteté de la Vierge Marie. Il fut condamné comme hérétique au concile d'Éphèse en 431. Ses disciples pourchassés trouvèrent refuge en Perse, en Asie centrale et en Chine. Plusieurs évêchés, dont celui de Merv et de Samarkand, furent constitués ; ils dépendaient du catholicos de Bagdad. Le nestorianisme connut un grand succès auprès des tribus türks et mongoles. Au XIe siècle, les kereit et les naïman se convertirent, et, quand les missionnaires du Moyen Âge se rendirent à la cour des Khan, ils furent stupéfaits de rencontrer un si grand nombre de chrétiens en Orient, mais surtout ulcérés qu'ils fussent nestoriens. Les nestoriens conservèrent une grande influence jusqu'au XIVe siècle.

Judaïsme

Des colonies juives s'installèrent en Asie centrale sous Tamerlan, mais la présence juive remonte bien au-delà, sans doute dès le VIe siècle. Les juifs étaient souvent commerçants ou banquiers, puisque l'islam interdisait l'usure, ou encore orfèvres, tisserands. Très bon médecins, ils avaient la réputation de fabriquer les plus efficaces talismans. Arminius Vambery décrit le statut surprenant dont bénéficiaient les juifs de Boukhara au XIXe siècle ; empreint d'un racisme déclaré, ce statut eut pourtant l'avantage d'éviter aux juifs l'esclavage auquel étaient réduits tous les autres infidèles : " le juif seul, reconnu " incapable ", c'est-à-dire indigne de l'esclavage, échappe de sa personne à leur rapacité, privilège qu'il doit à l'aversion dont il est l'objet, mais dont le bénéfice compense parfaitement l'origine aux yeux des enfants d'Israël. " Il ne faut pas oublier non plus que les juifs payaient de fortes taxes, bien supérieures à celles des autres habitants de Boukhara.

La communauté juive de Samarkand comptait plus de 50 000 fidèles au XIIe siècle. Elle est la seule communauté religieuse à avoir résisté à l'islam, puisqu'on recensait encore en 1989 quelque 37 000 juifs boukhariotes. Un très grand nombre d'entre eux ont émigré dès la perestroïka et, surtout, après la chute de l'URSS, mais les quartiers juifs de Samarkand et Boukhara sont toujours là.

Orthodoxie

L'orthodoxie n'est arrivée que tardivement en Asie centrale, au XIXe siècle, avec la conquête russe. Les plus anciennes églises étaient construites en bois, et très peu ont résisté au temps. Persécutée sous les soviétiques, la religion orthodoxe est à nouveau pratiquée par les Russes et les Ukrainiens restés en Asie centrale.

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