Guide Afghanistan : Mode de vie

Les modes de vie afghans sont encore, au XXIe siècle, très traditionnels et marqués par une application stricte de la religion. Les nombreuses années de guerre ont freiné le développement du pays : les systèmes de santé, d'hygiène ou encore d'éducation sont à reconstruire. La population de l'Afghanistan est en croissance rapide. Elle se caractérise par son extrême jeunesse et son espérance de vie encore très basse.

Il est assez difficile de parler de caractère national dans un pays où cohabitent des dizaines d'ethnies. Le peuple est marqué par cette pluralité ethnique. Les Afghans n'ont en commun que le fait d'avoir refusé l'envahisseur et leur goût pour l'indépendance. Encore que les combats contre leurs divers ennemis ne les ont pas soudés pour autant ! Après l'invasion soviétique, l'Afghanistan a été déchiré par une guerre civile. Les guerres ethniques ont creusé le fossé. Aujourd'hui encore, les talibans combattent non seulement les militaires étrangers de l'OTAN mais aussi, et surtout, les forces de sécurité afghanes. La guerre civile (1992-1996) a fait naître beaucoup de ressentiment entre les ethnies, ressentiment encore sensible aujourd'hui.

Les différentes ethnies ne se mélangent pas entre elles, ou peu. Chacun vous dira que sa tribu est supérieure aux autres. Quant à l'origine de l'Afghanistan, les Pachtounes se l'attribuent, tout comme les Tadjiks. Il n'y a pas de cohésion nationale en Afghanistan. L'unité afghane pourrait se baser sur une même culture et un partage des mêmes valeurs, comme la volonté d'indépendance, le respect des personnes âgées ou encore l'hospitalité. Mais ces caractéristiques ne sont en rien afghanes. Même la culture afghane est un mélange de plusieurs influences. Il n'y a pas une identité unitaire mais plusieurs, et c'est cette diversité ethnique et culturelle qui, en réalité, forme le caractère national afghan. Les Afghans se retrouvent cependant dans la religion et leur mode de vie.

Vie sociale
Les personnalités locales, entourées de leurs gardes du corps.
Les personnalités locales, entourées de leurs gardes du corps.

Naissance et âge. L'Afghanistan est un des pays du monde où le taux de natalité est le plus élevé (les Afghanes ont en moyenne près de 7 enfants). Mais la mortalité infantile est extrêmement forte : un enfant sur six meurt au cours de sa première année et tous n'atteignent pas l'âge adulte. La mortalité en couches est la première cause de décès pour les femmes. Les systèmes de santé ne sont pas encore au point. D'ailleurs, l'espérance de vie, femmes et hommes confondus, se situe autour de 46 ans. La population afghane est extrêmement jeune. Seulement 2,4 % des Afghans ont 65 ans et plus. L'âge moyen est de 17 ans. Quant aux 14 ans et moins, ils représentent 44,6 % de la population. Les rues de Kaboul sont pleines d'enfants. La partie la plus importante de la société est celle des 15-64 ans, qui forment 53 % de la population.

Les prénoms les plus courants sont tirés du Coran, mais aussi de l'histoire afghane. Beaucoup de prénoms se terminent par le suffixe -ullah (dieu) : Hashmatullah, Enayatullah, Ahmadullah, Aminullah, Najibullah, Amanullah, etc. On ajoute souvent " shah " aux prénoms (comme pour Ahmad Shah Massoud), qui signifie roi. Lors d'une naissance, la tradition veut que les parents ouvrent le Coran et s'arrêtent au hasard sur une page d'où l'on tirera le nom de l'enfant. Les prénoms féminins se terminent le plus souvent en -a : Suraya, Nadia, Harifa, Marzia, etc. Pour marquer l'affection, les Afghans utilisent le suffixe " djan ", qu'ils ajoutent aux prénoms. Ainsi Suraya-djan, pour dire " ma chère Suraya " ou " petite Suraya ".

L'apparition du nom de famille est assez récente en Afghanistan et date des années 1960. D'ailleurs, de nombreux villageois ne connaissent toujours pas leur nom et utilisent le prénom de leur père ou le nom de leur village. En général, le nom de famille indique d'où l'on vient, par une référence au nom d'une tribu, d'un village ou d'une filiation (" le fils de ", contrairement aux pays arabes, où l'on dit souvent " le père de "). Le nom de famille peut également désigner la fonction, le titre ou la profession de quelqu'un. On ajoute Khan aux noms des personnes importantes (riches ou respectables). Dans le Sud, chez les tribus pachtounes, des noms de famille se terminent souvent en -aï, comme Karzaï, Nourzaï, etc.

Education. Seulement 36 % de la population afghane savent lire et écrire. Et l'écart entre les femmes et les hommes est important : 51 % des hommes sont alphabétisés contre 21 % des femmes. Les années de guerre ont fortement endommagé les écoles et le système scolaire. La guerre contre l'Armée Rouge a détruit environ 2 000 écoles dans tout le pays. Beaucoup d'enfants n'ont pas été scolarisés entre 1992 et 1996. Du reste, l'éducation n'était pas une priorité, sauf à Hérât et à Kaboul, qui sont des exceptions. Quoi qu'il en soit, dans les campagnes, les filles n'étaient pas scolarisées, que ce soit avant les talibans ou sous leur régime. A l'époque des Soviétiques, on a ouvert des écoles pour filles et les communistes ont favorisé l'éducation des enfants.

Ils ont été jusqu'à forcer les filles à suivre les cours dispensés par des professeurs masculins ; les mères étaient furieuses. Avec l'arrivée au pouvoir des talibans, les écoles de filles ont été fermées. Aujourd'hui, à Kaboul, filles et garçons vont à l'école. Ils portent l'uniforme : les fillettes sont en pantalons et veste noirs et portent un voile blanc. Dans le Sud, ce n'est pas le cas. Les familles ont peur d'envoyer leurs enfants à l'école, car certains doivent parcourir plusieurs kilomètres. La peur des enlèvements et la recrudescence de l'insécurité privent les fillettes d'une éducation. D'autres provinces manquent de moyens pour ouvrir des écoles et acheter des livres. Les jeunes Afghans ont de plus en plus la soif d'apprendre et travaillent beaucoup à l'école. L'université de Kaboul a été fondée en 1932. Bombardée pendant la guerre, elle n'était ouverte sous les talibans qu'aux étudiants barbus. Aujourd'hui, elle accueille filles et garçons. La religion est primordiale dans l'éducation et, dans la plupart des villages, c'est le mollah qui est chargé de l'enseignement.

Structure sociale. Malgré le passé communiste de l'Afghanistan, la notion de classe sociale n'y est pas vraiment prégnante. On distingue cependant plusieurs catégories de population. La structure sociale afghane est surtout basée sur l'importance du pouvoir et sur la hiérarchie au sein de la tribu. Dans un village, on écoutera en priorité le mollah et l'ancien chef de guerre. Même si l'Afghanistan est un des pays les plus pauvres au monde, la misère n'y est pas tellement visible puisque la population est principalement rurale. Dans les villes, en revanche, on voit bon nombre d'handicapés, de veuves ou d'enfants faire la manche. On estime à 40 % le nombre de personnes sans emploi. Les anciens réfugiés qui rentrent en Afghanistan sont souvent totalement démunis et n'ont parfois pas les moyens de se loger. Cependant, on ne voit aucun SDF dormir dans la rue. La solidarité est telle qu'on ne laissera jamais un homme sans un toit.

Les habitants de Kaboul n'ont pas tout à fait le même mode de vie que les autres Afghans. Ils ont accès à plus de confort (sauf l'électricité). En général, ils peuvent trouver du travail assez facilement, notamment grâce à la forte présence étrangère dans la capitale afghane.

Les fonctionnaires gagnent correctement leur vie, mais sont loin d'être aisés. Un policier, par exemple, ne gagne pas plus de 100 US$ par mois. Ce qui est pour beaucoup dans l'augmentation de la corruption.

Il existe une catégorie de la population qualifiée de " nouveaux riches ". Ils vivent dans un quartier de Kaboul appelé " Shirpoor ", ou " Little Pakistan ". Ce sont des narco-trafiquants qui ont fait fortune dans le trafic de drogue. Certains anciens chefs de guerre, comme le général Dostom, se font construire des palaces dans ce quartier, où les maisons sont énormes et de toutes les couleurs.

Tout en haut de l'échelle sociale se trouve la diaspora afghane. Canadiens, Américains, Français ou encore Australiens, ils reviennent dans leur pays d'origine pour créer des entreprises ou travailler dans la reconstruction. Ils sont surnommés par les plus durs, les " laveurs de chiens ", pour avoir quitté l'Afghanistan et vécu avec des étrangers, et on leur reproche souvent leur absence alors que le pays vivait ses heures les plus sombres.

Habitat. L'habitat typique est la qala : une grande maison entourée de murs afin de préserver l'intimité des femmes. Même dans Kaboul, les maisons traditionnelles ont toutes un jardin et une cour et ne donnent pas sur la rue. La maison est avant tout l'espace des femmes. Souvent, trois générations vivent sous le même toit. Les maisons sont faites en pisé, qui est un mélange de brique crue, de paille et d'argile. Avant l'arrivée de l'hiver, tous les toits sont refaits. On peut alors voir les hommes préparant l'enduit qu'ils répandent sur le toit. Les fenêtres sont entourées de plastique pour empêcher l'air froid d'entrer. On se chauffe au moyen du burakhi. Dans la capitale, ces petites maisons ont tendance à disparaître.

A Kaboul, dans le quartier Macro Ryan construit par les Soviétiques, dominent plusieurs dizaines de barres d'immeubles, avec électricité et eau courante. Les immeubles d'habitations nouvellement construits ont des fenêtres aux vitres colorées. Les Afghans des classes aisées se font bâtir de grosses maisons à la pakistanaise, imposantes, ressemblant à des palais et très colorées. A Kaboul, le quartier qui les abrite est appelé Little Pakistan.

Quant aux nomades, ils vivent sous des tentes, souvent en poil de chèvre. Ainsi, des Kouchis ont planté leurs magnifiques tentes dans Kaboul et élèvent leurs moutons et leurs chèvres dans des décharges.

Aujourd'hui, les villes s'étendent considérablement. Avec, entre autres, le retour des réfugiés au pays, des bidonvilles apparaissent dans les périphéries des villes principales. C'est un phénomène assez nouveau.

Au nord du pays, on trouve beaucoup de yourtes. A Hérât, les maisons de terre ont un toit en forme de dôme arrondi.

Santé et retraite. Le système de santé en Afghanistan est très rudimentaire. De nombreux Afghans meurent jeunes : le taux de mortalité est de 20,3 pour mille. Pourtant, il y a des hôpitaux, mais la plupart sont insalubres et sales. Une partie de la population vit dans des endroits très reculés, dans la montagne par exemple.

Il leur est impossible de faire venir un médecin en cas d'urgence ou d'accouchement. On compte un médecin pour 50 000 habitants. C'est pourquoi, de nombreuses femmes accouchent chez elles, sans aucune aide médicale. La mortalité en couches est la première cause de décès chez les femmes. Dans les bazars, des ruelles entières sont consacrées à la vente de médicaments. Sur les boîtes que les exportateurs peu scrupuleux n'hésitent pas à vendre, on peut lire : " Only export for Afghanistan " (export pour l'Afghanistan seulement). '

Le problème majeur est l'accès à l'eau potable, dont seulement 13 % des Afghans bénéficient. Le taux de mortalité infantile est extrêmement élevé, c'est le plus haut d'Asie : 15,7 %. Un bébé sur six meurt au cours de sa première année et un enfant sur quatre n'atteint pas l'âge de cinq ans. En Afghanistan, il n'existe ni protection sociale ni retraite. Sauf pour les fonctionnaires de l'Etat, qui auront une petite retraite.

La ville nouvelle de Kaboul

La construction de la nouvelle ville de Kaboul est en projet. Dans la capitale actuelle, il n'y a ni réseau d'électricité, ni égouts, ni système de canalisations. C'est pourquoi, il a été décidé de bâtir une nouvelle ville... à côté de Kaboul. Ceci afin d'éviter de tout détruire dans la ville actuelle. Il serait en effet trop compliqué de se lancer dans de gros travaux de rénovation. C'est une agence d'architecture française qui a remporté l'appel d'offre lancé par le gouvernement afghan. La ville sera construite au nord de Kaboul, à l'horizon 2025. Le but premier est de pouvoir reloger tous les émigrés qui reviennent vivre en Afghanistan. En effet, après la chute des talibans, environ 3 millions d'expatriés afghans sont revenus dans leur pays. Les conditions de vie actuelles dans la capitale sont alarmantes. Dans la nouvelle ville, des structures sanitaires ainsi que l'approvisionnement en électricité ont été prévus. Pour plus d'informations, vous pouvez consulter le site www.dcda.gov.af

Mœurs et faits de société

Moeurs. Difficile de parler de la sexualité en Afghanistan. Celle-ci n'est jamais mentionnée ni même évoquée. Quoi qu'il en soit, il est très mal vu de se donner des signes d'affection dans la rue : on ne s'embrasse pas et on ne se tient pas la main. A la télévision, dès qu'une partie du corps de la femme est visible ou soulignée par ses vêtements, elle est immédiatement floutée. Ainsi, les clips musicaux de la chanteuse Shakira sont par exemple floutés au niveau de sa poitrine ; même chose pour les danseuses des films de Bollywood.

Le mariage est extrêmement important en Afghanistan. Il est souvent arrangé par les familles et, autant que faire se peut, on se marie entre membres de la même ethnie, voire de la même tribu. Ce qui est compréhensible puisque dans certains villages reculés, on n'a pas forcément l'occasion de rencontrer des gens d'autres villages. Un mariage revient ici très cher et les familles s'endettent sur plusieurs années pour le payer. Les frais sont à la charge de la famille de l'homme. Aussi, c'est un véritable problème sociétal : les jeunes garçons attendent souvent plusieurs années avant de pouvoir se marier. Lorsque le père donne sa fille, il demande en général une grosse somme d'argent. Pour un père, cela signifie que sa fille a une grande importance : la somme d'argent offerte à la belle-famille représente la valeur de la fille.

La robe de la mariée, souvent très colorée et bien kitsch, est également très chère. A Kaboul, on peut voir de nombreuses boutiques d'articles de mariage. Toute la cérémonie est organisée par les femmes. La future épouse ou son tuteur doivent au préalable donner leur consentement. Il y a deux témoins : soit deux hommes, soit deux femmes et un homme (rappelons que le témoignage d'un homme vaut celui de deux femmes...). Pendant la fête, femmes et hommes sont séparés. Ce sont surtout les hommes qui dansent. Ce n'est que dans les familles modernes que l'on peut assister à un mariage mixte. Chez les familles aisées et citadines, le mariage a lieu dans ce qu'on appelle un " wedding hall ". Ce sont de grands buildings assez kitsch que l'on trouve dans les villes. Très illuminés, fleuris et décorés, ils sont loués par des familles à l'occasion des mariages.

La polygamie est autorisée. Le Coran permet à un homme d'avoir quatre femmes au maximum, à condition de respecter l'égalité entre elles (sur tous les plans). Mais, dans les faits, la polygamie n'est pas très courante en Afghanistan. D'une part, parce que ça coûte cher d'avoir plusieurs femmes ; d'autre part, parce que de moins en moins de femmes l'acceptent. Toutefois, quand un homme meurt dans une famille, c'est un devoir pour son frère d'épouser sa veuve. En cas de stérilité, également, un homme devra prendre une autre femme. Les différentes femmes cohabitent plus ou moins harmonieusement.

Le divorce (mahre) est autorisé mais, pour éviter que les Afghans n'en abusent, l'homme doit donner à son épouse une somme d'argent au début du mariage. La femme peut théoriquement demander le divorce en cas de non-consommation du mariage ou de longue absence de l'époux.

La famille est une valeur primordiale, elle est le pilier de la vie afghane. Les membres de la famille vivent ensemble, dans la même maison. Tant qu'un enfant n'est pas marié, il ne quitte pas le domicile familial et il est même très fréquent qu'un fils continue à y vivre une fois qu'il a femmes et enfants.

Les domaines public et privé sont strictement séparés. Le foyer familial est régi selon une hiérarchie traditionnelle. Le vieillard est respecté. Le chef de la famille est l'homme, valide et en bonne santé. S'il meurt, son fils prend les rênes, sinon, c'est sa femme.

Le chef de famille doit faire vivre tous ceux qui habitent sous son toit et porte la responsabilité des événements familiaux. Si un membre de la famille agit mal, la honte entache toute la famille.

La place de la femme. Il faut chasser de l'esprit occidental l'image de la femme brimée, sous sa burqa. La société afghane est avant tout attachée à ses coutumes. Elle est fortement marquée par la tradition et c'est dans ce contexte que s'inscrit le statut de la femme.

En 1959, le roi Zaher Shah décide par décret que le port de la burqa n'est pas obligatoire. Il soutient également la scolarisation des filles. La première femme qui a joué un rôle politique dans le pays est Kobra Nourzaï, qui entre dans le gouvernement en 1965. Dans les années 1970, les documentaires sur Kaboul montrent des femmes en minijupe, sans voile, fumant des cigarettes et assez libérées. A cette époque, un tiers des étudiants sont des femmes. Mais cette évolution reste très limitée à la capitale afghane. Une fois au pouvoir, les communistes forcent les femmes à se libérer, mais cette évolution, trop rapide, qui n'est pas du voeu des femmes elles-mêmes produit l'effet inverse. Personne ne peut imposer aux Afghans un rythme qui n'est pas le leur.

L'image que l'on a, en Occident, des femmes enlevant leur burqa dès la chute du régime taliban, est totalement fausse ; aujourd'hui, la majorité des femmes la portent encore. Dans Kaboul, certaines femmes se contentent d'un léger voile. Mais la plupart, par pudeur, par précaution, par volonté de garder l'anonymat, ont gardé la burqa. Il ne faut pas le voir avec des yeux d'Occidentaux et penser que ces femmes sont totalement soumises. Car la femme a un rôle primordial dans le foyer : c'est elle qui dirige la maison et la famille. En outre, à Kaboul, de plus en plus de femmes travaillent. On les voit surtout dans les bureaux. En raison de la guerre, le nombre de veuves a augmenté et ces femmes doivent à présent subvenir seules aux besoins du foyer. A la campagne, elles participent aux travaux des champs, notamment dans le centre et dans le Nouristan. En province, femmes et hommes vivent séparément. Les habitations sont faites de manière à ce que chacun ait son territoire. Quand un étranger rend visite à une famille, il ne voit que rarement les femmes de la maison.

La Constitution afghane donne un rôle politique aux femmes. Un certain nombre de sièges leur est réservé dans les assemblées et, depuis novembre 2001, le pays s'est doté d'un ministère de la Condition féminine. Dans les médias, les femmes sont de plus en plus nombreuses à présenter les informations ou à exercer le métier de journaliste. Mais le combat n'est pas gagné.

Le travail des enfants

En Afghanistan, beaucoup d'enfants exercent un métier à temps plein. L'école coûte cher, le père est souvent absent, mort pendant la guerre ou trop âgé. Il faut donc nourrir les familles qui sont souvent nombreuses. Mendiants, laveurs de voiture, garagistes ou encore vendeurs de plastique, ils sont ainsi plusieurs dizaines de milliers à travailler dans la capitale afghane. Beaucoup d'autres travaillent en rentrant de l'école. Plusieurs ONG s'occupent de ces enfants des rues, comme Afghanistan Demain à Kaboul. D'autres enfants naissent pratiquement sous le statut " d'esclaves " selon un rapport publié par le UNHCR : ils doivent travailler pour aider leurs parents, souvent d'anciens réfugiés de retour d'exil au Pakistan ou en Iran, à rembourser leurs dettes. Le cas est très fréquent notamment dans les briquetteries autour de Kaboul.

Les droits de la femme depuis la chute des talibans

Les progrès ont été très importants depuis 2001. Dans la sphère politique, un quota impose 25 % de femmes au Parlement. En 2012, seule une députée était élue hors-quota : Fawzia Koofi. Quelques femmes sont aussi présentes au gouvernement. Autre progrès significatif : plus de 2,5 millions d'Afghanes vont à l'école et leur espérance de vie a augmenté.

Pourtant, beaucoup d'ONG pensent qu'on aurait pu faire beaucoup plus en une décennie. 50 % des filles n'ont toujours pas accès à l'éducation surtout en zone rurale ; les mariages précoces, les mariages forcés, la vente ou l'offre de femmes pour régler des disputes entre des familles, sont des phénomènes toujours largement répandus même s'ils sont interdits par la loi. La Constitution de 2004 reconnait l'égalité des Droits des hommes et des femmes, mais celles qui accèdent à des postes à responsabilité sont constamment menacées de mort par les extrémistes.

La loi pour l'éradication des violences faites aux femmes, votée en 2009, n'est pas ou peu appliquée. Elle n'a entraîné que très peu de condamnations. La police, les procureurs, les juges ne mettent pas vraiment un point d'honneur à recevoir, à traiter les plaintes de ces femmes. Même le gouvernement Karzaï semble faire marche arrière : il a récemment endossé un " code de conduite " élaboré par le Conseil des oulémas, un influent conseil de théologiens. Ce code de conduite autorise notamment les maris à battre leur femme dans certaines circonstances, recommande aux femmes de ne pas voyager sans escorte masculine et de ne pas " se mélanger " aux hommes dans les écoles, les marchés et les bureaux. Selon Human Rights Watch, cela montre un recul clair de l'implication des autorités afghanes dans la défense des droits des femmes.

L'organisation regrette aussi que de nombreuses femmes qui tentent de fuir ces violences se retrouvent en prison pour " crimes moraux ". Quitter son foyer n'est pas un crime selon la loi afghane, mais cela est traité comme tel par la justice. On accuse ces femmes d'avoir l'intention de commettre le crime de zina, c'est à dire d'avoir des relations sexuelles hors mariage. Cela pointe aussi le manque cruel de centres d'accueil pour femmes en détresse. Il en existe seulement 12 en Afghanistan, selon HRW (aucun dans le Sud du pays). En 2012, le ministre de la justice Habibullah Ghaleb a déclaré que les femmes qui s'y rendaient ne pouvaient être que des prostituées. C'est dire si l'Afghanistan a encore du chemin à faire...

Dans certaines régions, des femmes se sentent obligées de s'immoler par le feu pour appeler à l'aide. Plusieurs cas étaient par exemple à déplorer à Hérât début 2012. Plusieurs ONG, et des députés comme Fawzia Koofi, demandent une meilleure implication des femmes dans les discussions entre Washington et les talibans qui semblent s'esquisser (elles en sont pour l'instant totalement absentes) pour s'assurer que leurs droits ne vont pas régresser après 2014.

Religion

99 % de la population afghane sont musulmans. Parmi les musulmans, on distingue des sunnites (80 %), la plupart de rite hanafite, et des chiites (20 %). Les Afghans ont une pratique très traditionnelle de l'islam. Leur religion détermine profondément leur vie quotidienne. Parmi les chiites, certains sont ismaéliens. Avant l'arrivée de l'islam en Afghanistan, à partir du VIIe siècle, le bouddhisme était dominant. L'islamisation de l'Afghanistan s'est faite progressivement. Il a fallu attendre le XIXe siècle pour que la dernière province afghane devienne musulmane. Quelques juifs vivaient dans les grandes villes, jusqu'à la création d'Israël et le début des affrontements. Les sikhs ont également été très présents (ils étaient près de 30 000 essentiellement à Kaboul et à l'est du pays, où ils étaient commerçants), mais ont dû fuir le régime des talibans. Il reste toutefois au pays une minorité hindoue. C'est la seule communauté non musulmane d'Afghanistan. Les sikhs et les hindous qui sont restés se trouvent principalement à Jalababad. Depuis la chute du régime taliban, certains commencent à revenir.

L'influence exercée par l'islam sur l'Etat afghan est considérable. La charia, loi islamique, est appliquée et la justice s'exerce en fonction de cette dernière. Il est interdit en Afghanistan de chercher à convertir un musulman. Renier l'islam est passible de peine de mort. En 2006, un Afghan, Abdur Rahman, a été emprisonné pour s'être converti au catholicisme. Il avait travaillé au Pakistan, dans une ONG catholique. La charia prévoit la peine de mort pour les apostats. Suite aux nombreuses pressions mondiales, dont l'intervention personnelle de Bush, Abdur Rahman fut finalement libéré. Le ministère de la Justice a expliqué cette libération par le fait qu'Abdur Rahman était atteint de troubles mentaux. A sa sortie de prison, le converti a demandé asile et c'est l'Italie qui l'a accueilli. Aujourd'hui, des ONG catholiques sont installées légalement en Afghanistan et les catholiques étrangers ont le droit de pratiquer leur religion, mais dans la discrétion et sans faire de prosélytisme. On trouve des chapelles dans les différentes bases militaires de l'OTAN et une église à l'ambassade d'Italie, où le prêtre célèbre la messe tous les dimanches. Beaucoup d'étrangers s'y retrouvent, ce qui en fait un lieu très cosmopolite : Philippins, Européens, soldats américains ou encore des Africains. Quelques communautés de religieuses, dont une française, vivent en Afghanistan. Elles apportent de l'aide quotidienne aux familles en difficulté. Elles n'ont jamais eu de problèmes majeurs avec la population afghane et ont toujours vécu dans la discrétion. En revanche, certaines familles, notamment américaines, sont soupçonnées de faire du prosélytisme. En juillet 2007, une vingtaine de Sud-Coréens appartenant à une Eglise de Séoul se sont rendus dans le Sud de l'Afghanistan pour évangéliser des familles. L'histoire avait viré au drame puisque les 23 Coréens se sont fait enlever sur la route par les talibans. Trois d'entre eux ont été tués.

Les talibans ou la radicalisation de la foi

Taliban - taleb, signifie étudiant dans une école coranique. Le pluriel arabe de taleb est " talaba ". Taliban est un barbarisme provenant d'un mot arabe associé à un pluriel dans la langue persane. Quant au mouvement, apparu en Afghanistan en octobre 1994, il est fondamentaliste, fortement influencé par une école de pensée de Deobandi (madrasa en Inde), qui prône le retour à un islam pur, proche de celui qui existait au temps du Prophète. Ce mouvement fondamentaliste sunnite, issu de l'école de Deobandi, s'est fortement répandu au Pakistan. Pendant la guerre contre les Soviétiques, beaucoup de jeunes Afghans réfugiés au Pakistan étudiaient dans des madrasas des zones tribales. C'est ici qu'ils furent influencés par le courant de Deobandi. Les talibans veulent d'abord réislamiser les moeurs, la justice, les hommes. La forme de l'Etat n'a pas d'importance, à condition de respecter la loi divine. Et seuls ceux qui ont étudié ce courant sont à même de l'expliquer et d'en assurer le respect. Donc eux-mêmes.

A leur arrivée au pouvoir, les talibans appliquent leur propre vision de la charia (loi islamique). Toute la vie privée et publique des Afghans est contrôlée. En un mot, tout ce qui éloigne l'individu de l'islam est interdit. Jeux, musique, cinéma, danse, loisirs sont bannis de la société. Les prières doivent être dites cinq fois par jour. Les femmes doivent être discrètes et ne pas se faire remarquer, et les hommes sont obligés de porter la barbe et les cheveux courts. Une police religieuse patrouille dans les villes et les villages pour s'assurer que les lois sont bien respectées.

Des femmes sont battues pour avoir porté de simples chaussettes colorées. Elles doivent obligatoirement porter la burqa lorsqu'elles sortent de chez elles ; cependant, contrairement à ce qu'on peut penser en Occident, la burqa n'a pas été inventée par les talibans. Pratique importée de l'Inde, elle existait bien avant leur arrivée et appartient à la tradition, particulièrement dans les villages. C'est d'ailleurs pourquoi beaucoup de femmes continuent à la porter, même depuis que les talibans ont été chassés du pouvoir.

Depuis 2001, l'influence des talibans reste très importante, notamment dans le Sud et l'Est du pays. Ils affirment avoir " changé " : plus d'obligation de porter une barbe longue, plus d'interdiction d'écouter de la musique (elle fait d'ailleurs partie intégrante maintenant de leurs films de propagande) ou de regarder la télévision. Mais leur pratique de l'islam est toujours fondamentaliste. Par exemple, ils ne s'opposeraient plus à ce que les femmes aillent à l'école, mais dénoncent toujours fermement la mixité dans les classes. " Pour étudier, une femme doit se couvrir, ne pas se promener avec des garçons sur la route de l'école ni les cotoyer dans un moyen de transport et l'enseignement doit être réalisé par un homme ", insiste Mohammed Qalamuddin, ancien vice-responsable talibans du ministère des Vices et des Vertus (police religieuse) reconverti dans le Haut Conseil national pour la Paix d'Hamid Karzaï. Les talibans sont accusés de faire pression dans les villages du Sud pour que les familles soient dissuadées d'envoyer leurs filles à l'école.

Aujourd'hui, malgré tout, une partie de la population afghane verrait d'un bon oeil leur retour au pouvoir, car, pour eux, les talibans sont les seuls à être en mesure de ramener la paix en Afghanistan.

L’Aga Khan

L'actuel Aga Khan est devenu imam des musulmans chiites (imamites ismailis) à l'âge de vingt ans. Il est le 49e imam héréditaire de cette branche de l'islam. Et, selon les ismaéliens, il descend du prophète Mahomet par son gendre et cousin Ali, premier imam, et son épouse Fatima, fille du Prophète. Il est né à Genève et a passé son enfance au Kenya puis a suivi des études en Suisse. Il a obtenu ensuite le diplôme d'histoire islamique à l'université de Harvard, aux Etats-Unis. Aujourd'hui, les ismaéliens sont disséminés dans vingt-cinq pays, principalement en Asie centrale et occidentale, en Afrique et au Moyen-Orient, ainsi qu'en Amérique du Nord et en Europe. L'Aga Khan axe ses réflexions sur la spiritualité et la philosophie de l'islam et de la foi. Il est à la foi leader spirituel, prince, mais aussi un homme d'affaires. En Afghanistan, il a participé à la création du premier opérateur de téléphonie mobile (Roshan), dont il est actionnaire à 55 %. Le grand hôtel Serena a été financé, entre autres, par sa fondation. Il a fondé le réseau Aga Khan de développement (AKDN), très impliqué en Afghanistan, exerçant des activités sociales, économiques et culturelles. AKDN a pour rôle d'améliorer les conditions de vie et de promouvoir le progrès social dans des régions en développement. L'actuel Aga Khan est une personnalité très respectée par les ismaéliens. Il est l'envoyé de Dieu sur terre. Philanthrope, il oeuvre beaucoup dans des pays en difficulté. Homme d'affaires et de la jet-set, il reste toutefois un homme de son monde.

Le dernier juif d'Afghanistan

Le dernier juif d'Afghanistan, Zebulon Zimintov, est mort en 2008. Il vivait à Kaboul, où une synagogue existe encore dans Flower Street, dans le centre-ville. En 1840, on estimait à 40 000 personnes la communauté juive d'Afghanistan, répartie dans les grandes villes du pays. Certains sont venus s'y installer en fuyant l'Iran et l'Ouzbékistan. La plupart ont quitté l'Afghanistan à partir de 1948, à la création de l'Etat d'Israël, et les derniers ont fui la guerre. En 1980, le pays comptait encore 300 juifs. Les juifs, ou Yahoudi, étaient surtout présents à Hérât (où il y a encore deux synagogues) et à Kaboul, où ils étaient connus pour leurs travaux sur les plantes médicinales.

Naissance et développement de l'islam

Le prophète. Le prohète Mahomet (son nom signifie " le louangé ") est né dans la ville de La Mecque en 570. Issu du clan hachémite de la tribu des Qoraïchites au pouvoir à La Mecque, Mahomet était un homme simple, conducteur de caravanes de chameaux, qui avait traversé beaucoup de contrées lors de ses périples commerciaux. C'est sans doute au cours de ses voyages qu'il a découvert les contenus de la Thorah et du Nouveau Testament, en discutant avec des tribus qui ont embrassé l'une ou l'autre de ces religions, juive ou chrétienne. Rien ne le prédestine à devenir le " Rasul Allah ", " l'envoyé de Dieu ", lorsque, à l'âge de 40 ans (on date l'événement de 610), dans une caverne du mont Hira, il reçoit de l'archange Gabriel ses premières révélations : le Dieu des juifs et des chrétiens l'a choisi comme messager auprès des populations arabes. Mahomet sort converti de cette rencontre fantastique et commence à prêcher contre les cultes idolâtres pratiqués par sa tribu, les Qoraïchites. Il s'en prend notamment au pèlerinage païen à la Kaaba, pratiqué par la majorité des populations arabes. Il est menacé de mort par les siens et émigre (l'Hégire) vers la ville de Yathrib, qui prendra le nom de " Medinat al-Nabi " (" la ville du Prophète "). Le prophète Mahomet reçoit, en deux temps, la révélation du texte sacré, le Coran (qui vient de qaraa, qui signifie " lire "), révélation descendue sur Mahomet par l'intervention de l'archange Gabriel. Le texte sacré sera dicté au jour le jour à des scribes, qui l'écrivent sur des ostraca (tessons de poterie servant de support à l'écriture). C'est au VIIIe siècle que le texte sera décrété complet. La première des révélations, à La Mecque, est plus spirituelle ; la deuxième des révélations, à Médine, est plus juridique. Le Coran est la source de la loi musulmane, la charia, en même temps qu'il indique le sens de l'islam (qui signifie " soumission à Dieu "). S'inscrivant dans la tradition de la " religion du Livre ", le Coran se pose d'emblée comme venant conclure une révélation " falsifiée " par les religions juive et chrétienne. De Médine, Mahomet lance le djihad contre La Mecque et ses idolâtres. Proche des juifs de Médine au début de son séjour à Tathrib, Mahomet décrète que c'est tourné vers Jérusalem que l'on doit prier. Ses relations avec la communauté juive devenant tendues, puisque ses membres refusent d'embrasser l'islam, il indique de manière définitive que la prière doit se faire dans la direction de La Mecque (qibla). La victoire du " fossé ", en 627, contre La Mecque, permet aux musulmans de reprendre la ville et la destruction de ses trois cents idoles est ordonnée par Mahomet. Les premiers pèlerinages s'organisent et la majorité des habitants de la péninsule Arabique se convertissent. Le prophète Mahomet meurt le 8 juin 632, à Médine, au retour d'un dernier pèlerinage à La Mecque. Après sa mort, sa gloire ira en s'amplifiant dans le monde entier, où les musulmans sont actuellement plus d'un milliard. Mais alors qu'il a fait montre durant sa vie d'un génie politique hors du commun, qui a permis à l'islam de se répandre très rapidement, le prophète Mahomet ne s'est pas désigné de successeur. Il n'y a pas de calife (le " lieutenant de Dieu sur terre ") désigné et sa disparition soudaine laisse les fidèles désemparés. Aux premières rivalités entre ses proches, on invoque la tradition bédouine et c'est au groupe que revient la responsabilité de la désignation du calife.

Les quatre premiers califes sont appelés " les bien guidés ". Le premier est Abou Bakr Al-Siddiq (632-634) ; il est le père d'Aïcha, la femme préférée du prophète Mahomet. Ce vieillard apprécié pour ses qualités humaines va mettre en place la première administration du calife, le divan, pour l'armée et les villes. Le deuxième calife est Omar ibn Al Khattab (634-644) ; le prophète Mahomet avait épousé sa fille Hafsa. Il est considéré comme l'organisateur de l'Etat musulman ; il se fait nommer " commandeur des croyants ". Il dirige les campagnes de conquête de la Syrie, de l'Irak, de l'Egypte et de la Perse. Il expulse les chrétiens et les juifs d'Arabie, et créé deux impôts pour les non-musulmans : le gyziyah (l'impôt de capitation, individuel) et le kharaj (l'impôt foncier), qui deviennent d'importantes sources de revenus dans l'organisation des Etats nouvellement envahis. Omar ibn Al Khattab est assassiné dans la mosquée de Médine.

Le troisième calife, désigné par un conseil formé par Omar ibn Al Khattab, est Ossman ibn Affan (644-655) ; il épouse deux des filles du prophète Mahomet. Issu des milieux d'affaires de La Mecque, il ne ressemble guère à ses deux prédécesseurs de Médine. On lui reproche vite un népotisme sans retenue.

La contestation de son gouvernement est telle qu'il doit fixer le texte coranique de manière définitive et ainsi interdire à quiconque de réclamer le califat au nom de la Révélation du livre. Il est assassiné sur les ordres du fils d'Abou Bakr Al Siddiq, le premier calife.

Le quatrième calife est Ali ibn Abi Talib (656-661) ; c'est le gendre et le cousin germain du prophète Mahomet. Son élection n'est pas reconnue par l'ensemble des musulmans. La Syrie, la tribu d'Ossman ibn Affan et Aïcha ne lui prêtent pas allégeance. En 656, à Bassorah, il est obligé de livrer la première des batailles entre musulmans. Il cantonne Aïcha à Médine jusqu'à sa mort. Il livre une autre bataille célèbre sur l'Euphrate, où ses adversaires, pour cesser le combat et réclamer un arbitrage moins sanglant, hissent au sommet de leurs lances des pages du Coran. Mouawiya et ses sunnites rencontrent alors Ali et ses chiites.

Un des lieutenants d'Ali, Abou Moussa Al Achari, est convaincu d'avoir participé à l'assassinat d'Ossman ibn Affan ; Ali est dépossédé de son titre de calife et remplacé par Mouawiya, qui créera la lignée des Omeyades. Ali, à qui on laisse le gouvernement de l'Irak, part en guerre contre la tribu de Mouawiya. Il sera finalement assassiné en 661.

Les écoles juridiques et spirituelles. Outre les dynasties politiques régnantes, l'islam est à comprendre selon une déclinaison de ses écoles juridiques, apparues entre les VIIIe et IXe siècles. Quatre écoles sunnites se développent alors, s'appuyant sur le principe que la charia doit être interprétée : on recourt soit à la sunna (qui signifie aussi " pratique intérieure "), soit aux pratiques traditionnelles antérieures, à l'analogie ou bien encore à l'istihsan (qui signifie " pratique personnelle ").

L'école hanafite, la plus suivie en Afghanistan, naît en Irak au VIIIe siècle et privilégie le recours à l'opinion personnelle. Son créateur, Abou Hanifa, est très libéral et accorde beaucoup d'importance aux circonstances en tant qu'éléments modérateurs ou aggravants. Un de ses disciples, Abou Youssef, écrira un traité fameux relatif aux finances publiques, à la fiscalité et au droit pénal. Il éclaire de ses propos le sort réservé aux prisonniers, le partage des biens ou encore les règles de la guerre et de la paix. La plupart des sunnites afghans appartiennent à l'école hanafite.

L'école malikite est aussi appelée " l'école du hadith ". Les hadith (ou " traditions ") sont les premiers commentaires du Coran, écrits par Ibn Al-Abbas, cousin du prophète Mahomet, et qui interprètent la théologie, le droit et commentent parfois l'exégèse. Une grande partie de ces hadith n'a pas été retenue par la théologie et la science juridique musulmanes. Seuls certains commentaires considérés comme conformes à la pensée du Prophète ont été conservés. Cette école, créée aussi au VIIIe siècle par Malik ibn Anas, à Médine, ne retient pas la libre opinion, que ce dernier considère comme erronée. Son interprétation est donc plus prudente, plus proche des textes sur lesquels il s'appuie, et il ne recourt pas à l'extrapolation. Les adeptes de cette école se trouvent principalement en Afrique du Nord.

Le hanbalisme est la troisième école, créée à Bagdad au IXe siècle, de manière un peu plus tardive, par Mohammed ibn Hanbal. C'est l'école la plus rigoriste de l'islam. Son créateur défend la tradition et la sunna. Ses disciples prônent l'épuration de la doctrine et la réforme de la société et de la politique des Etats musulmans. Opposé aux innovations, figé sur la question des moeurs, le hanbalisme ferme la porte à toute interprétation. Au XIVe siècle, à Damas, un de ses disciples se fera le chantre des anti-chrétiens et des anti-juifs. S'il déclare que leur religion est imparfaite, il demande aussi que tout non-musulman soit écarté des fonctions publiques de l'Etat. Cette école donnera naissance au wahhabisme saoudien et aux autres formes du fondamentalisme islamique. La quatrième école est chafiite ; elle a été fondée par un disciple de Malik ibn Anas, au IXe siècle. Lui aussi accorde une grande importance aux hadith se rapportant directement au Prophète. S'il respecte le consensus des savants en matière coranique, il n'est pas pour le développement du jugement personnel. C'est son école qui a écrit le traité le plus important de droit sunnite, Al ahman al-soultanniya, qui fait encore référence aujourd'hui.

L'ismaélisme est un courant de l'islam chiite. Les ismaéliens seraient près de 15 millions, répartis dans le monde entier. En Afghanistan, on les trouve parmi les Tadjiks du Pamir ou certains groupes hazaras.

Le soufisme est une sorte de philosophie, un mouvement de spiritualité de l'islam. " On pourrait définir le soufisme comme l'ensemble des efforts personnels pour aboutir à la connaissance de Dieu et à l'accomplissement de soi dans l'oeuvre divine. " (Le Carrefour afghan, de Bernard Dupaigne et Gilles Rossignol). Les soufis méditent, contemplent et s'extasient. Ils se regroupent en communautés ou confréries. Dans chaque confrérie, un maître est entouré de ses disciples. Les soufis ont eu leurs heures de gloire à Balkh et dans les environs d'Hérât.

Le Coran

Publié en arabe en 634, deux ans après la mort de Mahomet, le Coran (Al Quran) est le seul livre sacré des musulmans. Il est constitué d'un mélange de doctrines puisées dans les fondements de l'islam, mais aussi dans ceux de la religion juive et chrétienne (dans la Torah et dans l'Evangile). Le Coran reprend les paroles de Dieu, rapportées à Mahomet par l'archange Gabriel (Jibraîl). La juste lecture et sa connaissance sont le fondement de l'éducation musulmane traditionnelle (écoles coraniques).

Le Coran a été écrit dans un alphabet archaïque, sur des omoplates de chameau, du vivant du Prophète, et sa structure a bien évolué depuis. Seul le contenu des textes est resté inchangé. L'ouvrage recèle de très nombreuses difficultés d'interprétation, qui ne peuvent être comprises que par les plus grands érudits. Il est composé de 114 sourates (sûras), ou chapitres, et est divisé, pour des raisons pratiques de lecture, en 30 parties (juz'i). Chaque sourate est encore divisée en versets (aya), au nombre de 6 211. Au cours du VIIe siècle, deux grands théologiens ont tenté de le moderniser quelque peu afin de le rendre plus accessible à tous : Mohammad Abdu (Egypte) et Abû Kalam Azad (Inde).

Le but avoué du Coran est de régir la vie sociale de la communauté des croyants, tant sur les plans militaire et politique que religieux. C'est pourquoi on a vu fleurir des républiques islamiques partout dans le monde musulman (Iran, Pakistan...), basées politiquement sur le Coran. Le Coran joua aussi un rôle majeur dans l'histoire de la littérature arabe. Il imposa le dialecte arabe comme langue associée au triomphe de la doctrine.

Sunnites et chiites, quelle différence majeure ?

L'islam connut à ses débuts une séparation des fidèles en deux courants : les sunnites et les chiites. La rupture entre les deux mouvements résulta de la lutte qui opposa Ali, le gendre de Mahomet, à Mouawiya, le fondateur de la dynastie des Omeyades. Après un conflit qui coûta la vie à un nombre considérable d'hommes, Ali, quatrième calife, fut vaincu en 661 par son rival de Damas, qui lui succéda dans ses fonctions.

Les sunnites (80 % des Afghans) sont des musulmans " orthodoxes " revendiquant leurs origines dans la branche des chevaliers omeyades. Ces partisans reçurent le nom de sunnites car ils puisent le nom de leur courant religieux dans la sunna, qui signifie " tradition ". Les chiites, pour leur part, ne reconnaissent que les descendants d'Ali. Ils représentent 20 % de musulmans afghans et appartiennent en général à l'ethnie Hazara, persécutée sous le régime des talibans et toujours discriminée aujourd'hui.

Les cinq piliers de l'islam
La mosquée Hadji Piyada, à Balkh, est la première construction islamique connue du pays.
La mosquée Hadji Piyada, à Balkh, est la première construction islamique connue du pays.

La vie spirituelle d'un musulman est codifiée par des obligations quotidiennes, des pratiques liturgiques, mais laisse aussi la place à un mysticisme comme le pratiquent les soufis.

Les juristes de l'islam ont formulé les obligations principales du croyant, sous l'intitulé des " cinq piliers ".

La profession de foi, ou chahada, est le premier des piliers. Tout musulman fait deux professions solennelles énoncées dans une formule unique, qui rappelle que Dieu est unique et que Mahomet est son prophète : " J'atteste qu'Allah (Dieu) est le plus grand de tous et que Mahomet est son envoyé. " C'est par l'énoncé clair et audible de cette formule, avec l'intention véritable d'y adhérer, que l'individu entre dans la communauté musulmane. Elle doit ensuite être récitée chaque jour, à l'heure de la prière et au moment de la mort, pour se voir ouvrir les portes de l'au-delà.

La prière rituelle, qui ponctue cinq fois par jour le quotidien du croyant musulman, est le deuxième pilier. L'aube est marquée par la prière du al fajr, l'heure médiane par al zouhr, le milieu de l'après-midi par al asr, le coucher du soleil par al maghreb et la nuit par al icha. Le vendredi, la prière de l'heure médiane est dirigée par un imam (ce qui signifie " guide "), qui prêche à l'assemblée réunie. L'heure de la prière est annoncée par le muezzin. Ce dernier effectuait jadis le tour du minaret de la mosquée afin d'être entendu par tous. A présent, des haut-parleurs l'ont démis de ses fonctions, quoique, avec le manque d'électricité en Afghanistan, certains ne les utilisent pas. On doit prier en état de pureté corporelle et spirituelle ; si l'eau est utilisée pour les ablutions, le croyant peut recourir à des gestes symboliques après avoir touché le sol, le sable, une pierre propre ; il se tourne alors en direction de La Mecque, selon les prescriptions du Prophète. Si l'appel à la prière par le muezzin commence toujours par la proclamation " Dieu est le plus grand ", celle-ci comprend invariablement la récitation de la première sourate du Coran, appelée la fatiha. La grande prière du vendredi a lieu vers midi. Les rues se vident, tous les hommes sont à la mosquée. A la sortie, ils restent dans ses parages à discuter.

Le troisième pilier est l'aumône légale, appelée zakat. C'est le troisième des piliers imposés aux bien portants. Cette charité volontaire - on la distingue en effet d'une aumône volontaire, appelée sadaqa - est un moyen de venir en aide à la population indigente. Les écoles juridiques n'ont pas fixé de manière claire le pourcentage qui devait être versé de sa fortune pour pouvoir être considéré comme un acte valide. L'aumône légale se pratique tous les jours, mais trouve son expression la plus grande pendant le Ramadan, au moment de la rupture du jeûne, où il convient d'offrir à manger aux nécessiteux. Généralement, l'aumône représente 5 % des revenus et sert plus à la construction des mosquées qu'aux pauvres.

C'est durant le neuvième mois lunaire, le mois de Ramadan, que peut se vivre le quatrième pilier du jeûne. Du lever du soleil à son coucher, les croyants doivent s'abstenir de toute absorption de nourriture, de boisson, de tabac et doivent aussi être chastes.

Les malades, les femmes enceintes et les voyageurs en sont dispensés. Le jeûne musulman, s'il est aride durant la journée, donne lieu à de grandes festivités la nuit, car le Ramadan est avant tout un mois de joie ; en effet, on célèbre la Révélation qui est descendue de Dieu et qui a donné la voie aux hommes.

Deux jours avant la fin du mois de Ramadan, la nuit du destin (al qadar) est l'occasion de psalmodier le texte coranique dans son intégralité. Une fête vient conclure le mois de jeûne, c'est l'Aïd el-Fitr.

Le dernier des piliers est le pèlerinage que doit accomplir une fois dans sa vie tout musulman qui en a les moyens. Le grand pèlerinage, appelé al hajj, doit se célébrer entre le 8e et le 13e jour du mois dhou al hijja, à La Mecque. Mais son coût le rend inaccessible à la plupart des Afghans. Le petit pèlerinage, qui ne fait pas partie des cinq piliers, est appelé oumra ; il a lieu autour de la Kaaba, qui contient une pierre offerte par l'archange Gabriel à Agar et à son fils Ismaïl après qu'Abraham a renvoyé sa servante et son fils dans le désert. Le pèlerinage est purificateur et efface les fautes du pécheur. C'est le sommet de la vie spirituelle du musulman. Son but principal est de se faire pardonner les péchés commis, mais tous les musulmans ne peuvent pas se le permettre, économiquement et physiquement. Quand il revient, le pèlerin peut porter le titre de hadji. Il est respecté par les habitants du village. Les cérémonies s'effectuent individuellement, à partir des derniers jours du dixième mois. Elles consistent à déambuler sept fois autour de la Kaaba et à circuler sept fois autour des monts Safâ et Mzrwâ, non loin de la ville portuaire de Djedda. Les cérémonies collectives, quant à elles, commencent à partir du douzième mois et consistent en une station de tous les pèlerins dans la vallée désertique, devant le mont Arafat, à quelques kilomètres de la Ville sainte. Le gouvernement saoudien est le seul à pouvoir décider de l'acceptation des pèlerins dans la ville. Des quotas de pèlerins sont fixés et certaines nationalités ne peuvent être présentes, pour telle ou telle raison.

La « fatiha »

" Au nom d'Allah, le Bienfaiteur miséricordieux,

Louange à Allah, Seigneur des mondes, Bienfaiteur miséricordieux.

Souverain du Jour du Jugement !

Toi, nous T'adorons, Toi, nous demandons Ton aide,

Conduis-nous vers la voie droite,

La voie de ceux à qui Tu as donné Tes bienfaits,

Qui ne sont ni l'objet de Ton courroux, ni les Egarés ! "

Avertissement

La plupart des mosquées en Afghanistan sont interdites aux non-musulmans. Toutefois, si vous parvenez à pénétrer dans le sanctuaire, n'oubliez surtout pas de vous déchausser. Couvrez vos bras et jambes (shorts et jupes interdits), les dames devront couvrir leurs cheveux. Prévoyez donc un grand châle si une visite est au programme.

Restez silencieux et n'essayez pas de prendre des photos. C'est un lieu saint, et certains voyageurs ont tendance à l'oublier.

Le mollah

Il a une importance majeure en Afghanistan. Dans les villages, il endosse très souvent plusieurs rôles : professeur, juge et prêcheur de la bonne parole. On l'appelle aussi pour guérir les malades. En général, le mollah a étudié à la mosquée. Il organise toute la vie de la mosquée, récite la prière du vendredi, participe aux cérémonies familiales et se rend aux assemblées des barbes blanches. Dans le village, le mollah est un personnage-clé. On l'écoute et on lui obéit. Le conseil des ulémas a théoriquement autorité sur lui. Mais, en réalité, le mollah décide de ce qu'il dit lors de ses prêches. En février 2012, après l'incident des Coran brûlés par des soldats américains sur la base militaire de Bagram, certains mollahs ont appelé à des manifestations pour chasser l'infidèle, d'autres ont choisi d'appeler au calme ou de ne pas évoquer la controverse lors de la prière du vendredi.

Organize your trip with our partners Afghanistan
Transportation
Accommodation & stays
Services / On site

Find unique Stay Offers with our Partners

Send a reply