Guide Burundi : Population et langues
Le dernier recensement de la population burundaise date de 2008. La guerre, puis son arrêt, a eu un impact profond sur les évolutions démographiques dans le pays.
Données de base. Selon les résultats provisoires du dernier recensement, le Burundi comptait 8 036 618 habitants en août 2008 (estimation 2013 : plus de 10,8 millions d'habitants). Le taux de croissance démographique est de l'ordre de 3,3 % par an, et la population est très jeune, avec 46 % de Burundais qui ont moins de 14 ans.
Même si la fin de la guerre a amélioré l'existence des Burundais et la situation sanitaire du pays, l'espérance de vie à la naissance demeure faible, 59 ans en 2013. Le taux de mortalité brut s'est arrangé depuis quelques années, et s'établit à 10 pour mille (9 pour mille en France). Le taux de natalité reste en revanche élevé, à raison de 43 naissances pour mille habitants (France, 12 pour mille) et l'indice de fécondité des femmes est parmi les plus élevés des Grands Lacs, chacune mettant au monde en moyenne 6,4 enfants. Le Fonds des Nations unies pour la population encourage d'ailleurs le Burundi à réduire son indice de fécondité d'ici à 2025 !
Mais la culture résolument nataliste du Burundi, où la famille garantit production vivrière et prestige social, explique sans doute ce dynamisme démographique. Dans les années 1980, une politique de contrôle des naissances avait été initiée pour limiter à trois le nombre d'enfants par femme, mais elle fut contournée dans la plupart des familles. A la question de savoir combien elles avaient d'enfants, certaines mères répondaient qu'elles avaient " les trois de Mworoha " (du nom du promoteur de la mesure) et " les deux pour elles " (soit 5 en tout).
Répartition et activités. La majorité des Burundais habite " l'intérieur " du pays, soit le monde rural. Le taux d'urbanisation est parmi les plus faibles d'Afrique, mais les densités y sont au contraire parmi les plus fortes.
Ainsi, la population résidant en ville ou dans les agglomérations, même petites, n'excède pas 11 % du total, et les ruraux vivent sur des collines très peuplées, dans un habitat dispersé. La densité de population moyenne dépasse les 390 hab/km2, mais dans certaines régions on peut trouver jusqu'à 750 hab/km2. A elles seules, les quatre provinces de Kayanza, Ngozi, Muramvya et Gitega abritent plus des deux-tiers des Burundais. Les régions faiblement peuplées sont celles de basse altitude (Kumoso, Bugesera, Imbo).
Les villes ne peuvent vraiment être considérées comme grandes que dans le cas de Bujumbura, Gitega et Ngozi. Les deux dernières auraient plus de 100 000 habitants, tandis que la capitale compterait près ou plus d'un million d'habitants selon des estimations de 2013. Toutes les autres agglomérations n'excèdent pas des populations de l'ordre de 15 000 à 30 000 habitants.
En fait, près de 90 % de la population vit directement ou indirectement du secteur agropastoral. En ville, les citadins sont employés plutôt dans les services (commerces, administrations...).
Une population en mouvement. La guerre a entraîné des bouleversements démographiques et migratoires majeurs. Selon certaines évaluations, environ 350 000 Burundais ont trouvé la mort entre 1993 et 2008, et au moins 20 % de la population a été contrainte à la mobilité dans l'intérieur ou vers l'extérieur du pays. Les situations de déplacements ont été et sont encore variées, comme l'atteste le vocabulaire utilisé pour en rendre compte : réfugiés, déplacés, sinistrés, rapatriés, retournés...
Pendant des décennies les réfugiés ont submergé des camps implantés dans les pays voisins, notamment en RDC et au Rwanda, mais surtout en Tanzanie (plus de 450 000). Ils avaient quitté le Burundi après les " événements " de 1972, ou à partir de 1993, avec le début de la guerre civile. Depuis 2004, des centaines de milliers d'entre eux ont été rapatriés avec l'aide du Haut Commissariat aux réfugiés des Nations unies (HCR), et la plupart des camps ont été fermés en Tanzanie. Ce pays a, par ailleurs, concédé dans un geste spectaculaire et fort rare qu'il convient de saluer la citoyenneté à plus de 162 000 des réfugiés qui étaient installés depuis plus de 25 ans sur son sol et ne souhaitaient pas retourner au Burundi.
Selon des estimations du HCR, en 2012, plus de 7 % des habitants du Burundi étaient donc d'anciens réfugiés revenus des pays voisins au cours des huit dernières années. Souvent Hutu, ces " retournés " côtoient sur les collines des " déplacés ", qui avaient fui leur maison et leurs champs pendant le conflit et s'étaient regroupés dans des camps protégés par des militaires. Le plus souvent Tutsi, ces déplacés ont aussi souvent refusé de rentrer sur leur colline après le retour à la paix, et l'on estimait en 2012 qu'ils étaient encore des dizaines de milliers à travers le pays. Certains de leurs camps se sont transformés progressivement en petits centres urbains, ce qui a modifié la configuration spatiale du pays (traditionnellement, l'habitat est dispersé, sans villages).
Enfin, le Burundi est aussi pays d'accueil pour des réfugiés venus des pays voisins. Début 2014, le Burundi accueillait plus de 50 000 réfugiés, et abritait près de 80 000 déplacés internes. En dehors des Rwandais installés depuis les années 1959-1963, suite à la " révolution sociale hutu ", et de quelques autres arrivés après la prise du pouvoir par Paul Kagame au Rwanda, les plus nombreux sont les Congolais.
En sciences sociales, une ethnie est souvent définie comme un groupe humain ayant une souche commune (ou supposée telle), une langue, un mode de vie, une culture, une histoire et un territoire également communs. Selon ces critères théoriques, on pourrait donc dire que les Burundais forment une seule et même ethnie.
Pourtant, le fait ethnique est aussi un positionnement subjectif, les identités étant construites avant tout par les représentations que se font les individus et les communautés de leur propre itinéraire, de leur histoire et de leur position dans la société. Or, au Burundi, on trouve plusieurs groupes d'identification qu'on appelle, depuis la colonisation, des ethnies (on disait aussi " castes " ou " races " à l'époque), à savoir les Hutu (Abahutu), les Tutsi (Abatutsi) et les Twa (Abatwa). Ces trois ethnies correspondent en kirundi à l'ubwoko (pluriel : amoko), qui signifie littéralement une " catégorie ". L'appartenance à ces catégories est transmise par filiation paternelle. Ainsi, même s'il existe des mariages interethniques, l'enfant appartient toujours à l'ubwoko du père.
De très courantes proportions fixent la répartition ethnique de la population burundaise à 85 % de Hutu, 14 % de Tutsi et 1 % de Twa. En réalité, bien malin celui qui pourrait valider ces données, même si leur hiérarchisation ne fait pas de doute (les Hutu sont majoritaires, les Tutsi minoritaires et les Twa ultraminoritaires). En effet, ces proportions sont répétées invariablement depuis les années 1930, alors même que le mode colonial de calcul posait problème et que les évolutions démographiques depuis 90 ans ont fait bouger les répartitions. Par ailleurs, contrairement à ce qui a pu se produire au Rwanda dans la période postcoloniale et avant le génocide de 1994, le Burundi n'a jamais développé de système de recensement ou d'identification ethnique, ce qui ne permet pas d'avancer des chiffres précis.
L'opposition entre Hutu et Tutsi. L'un des drames du Burundi vient de l'utilisation politique de l'opposition Hutu-Tutsi qui s'est construite et a été manipulée pendant des décennies. Tout indique que le Burundi précolonial n'a pas vécu les massacres fratricides qui se sont succédé depuis au moins 45 ans. En revanche, l'antagonisme dans la période contemporaine s'est traduit par des actes d'une violence inouïe, avec des processus alternés d'élimination d'un groupe par l'autre (1965, 1969, 1972-1973, 1988, 1993-2008).
Sans s'engager ici dans des controverses scientifiques et en évitant les complexités du débat historique, on peut avancer que le système colonial puis, après l'indépendance (1962), les groupes dirigeants, ont beaucoup contribué à figer les distinctions ethniques et à crisper les relations identitaires entre Burundais.
Les missionnaires et les colonisateurs européens ont d'abord vu dans les Tutsi des conquérants " hamites ", venus d'Egypte ou d'Ethiopie pour imposer leur domination sur les " Bantous " (les Hutu), des cultivateurs sédentaires supposés être installés depuis plus longtemps dans la région. Le régime colonial, qui aimait à catégoriser choses et hommes, a pris appui sur des stéréotypes physiques recoupant des pseudo-capacités intellectuelles pour favoriser au pouvoir les Tutsi et les Ganwa (princes de sang, assimilés aux Tutsi). En effet, la littérature coloniale allemande puis belge a décrit les Tutsi comme des " seigneurs " pastoraux élancés et de haute intelligence, et a déterminé que, formant une " race supérieure ", ils étaient destinés à commander les Hutu, des " serfs " de petite taille voués à la seule activité agricole et ravalés à une moindre jugeote. Les recherches montrent comment, selon ces principes, tous les Hutu ont été exclus en quelques décennies des postes de chefs et de sous-chefs et comment les Tutsi en ont bénéficié - ainsi que des meilleures opportunités d'éducation.
Au lendemain de l'indépendance, alors que le Rwanda en révolution inversait les rôles, plaçant au pouvoir la majorité hutu, le Burundi a vu se perpétuer un système dans lequel la plupart des postes de responsabilité étaient confiés à des Tutsi : dans les organes étatiques et administratifs, à la tête des grandes entreprises et dans les corps supérieurs de l'armée.
Pendant des lustres, malgré les affrontements dramatiques qui ont endeuillé le pays (surtout en 1972, puis à partir de 1993), la question des discriminations ethniques n'a jamais été posée publiquement, et il fut même un temps où en parler était tabou. C'est à partir de 1988, après les massacres de Ntega et Marangara, qu'un débat a émergé, qui a plus tard éclipsé toutes les autres questions de société. Les revendications ethniques ont été portées haut et fort par les partis, mais aussi par les médias et, ensuite, par les groupes rebelles. Tous ont largement joué de ces clivages pour se maintenir ou parvenir au pouvoir.
La politique actuelle, issue d'un accord intégrant des proportions dans les répartitions des postes électifs et des responsabilités militaires, entérine un partage du pouvoir entre les deux grandes composantes de la population, hutu et tutsi. Rien ne permet d'affirmer qu'elle aura raison du problème ethnique, mais rien n'empêche non plus d'espérer qu'elle puisse offrir une solution. La question du clivage ethnique n'est pas la cause univoque des violentes crises qu'a connues le Burundi, dont la complexité et les ressorts sont variés (problèmes fonciers, économiques, politiques et sociaux). D'ailleurs, les compétitions intra-ethniques sont aujourd'hui aussi patentes, par exemple entre les partis politiques issus des rébellions hutus de la guerre (CNDD-FDD et FNL). Enfin, les initiatives de réconciliation tentées par les Burundais de la " société civile " s'avèrent aussi assez efficaces.
Les Batwa. Les Twa (Abatwa) forment une composante " ethnique " de la population très minoritaire. Ils sont souvent appelés " pygmées " en raison de leur petite taille, et forment une communauté paria dans la société burundaise. Traités comme des enfants par tous les autres, ils ont été marginalisés sous les régimes monarchiques et républicains (on ne contracte pas de mariage avec eux, on ne partage pas leur boisson ou leur nourriture...), de même que par les colonisateurs, qui parlaient d'eux comme des " nains " et allaient jusqu'à les comparer à des chiens dévoués !
Les Batwa vivent traditionnellement dans des villages près de la forêt primaire, et pratiquent pour survivre des activités de cueillette et de chasse. Ils sont aussi réputés pour la forge et la poterie. Leur mode de vie a été très affecté par la création du Parc national de la Kibira, par les différentes atteintes portées aux milieux naturels, puis par la guerre. On les trouve maintenant regroupés dans des communautés en lisière de la Kibira, voire loin de la forêt, où leurs moyens de survie sont dérisoires en l'absence de terres à cultiver ou d'autorisation d'exploiter les produits forestiers.
Des associations se sont développées ces dernières années pour leur venir en aide, et la Constitution de 2005 leur fait une (petite) place dans les institutions. Mais les mentalités de la majorité des Burundais sont loin d'avoir changé à leur égard : ils restent méprisés par la plupart de leurs compatriotes et leur situation est déplorable.
Les Baganwa. Les Ganwa (Abaganwa) sont les descendants des lignées dynastiques qui se divisaient, dans le Burundi monarchique, en quatre branches principales : les Bezi, les Batare, les Bataga et les Bambutsa (selon le nom du roi dont ils descendaient). Ils ont formé pendant des siècles et jusqu'à l'établissement de la République la classe dirigeante du pays, ultraminoritaire.
Leur origine " ethnique " reste incertaine, comme celle du fondateur mythique de la monarchie burundaise dont ils descendent. La colonisation a entériné leur appartenance à l'ethnie des Tutsi, mais certaines traditions orales les rattachent plutôt à des clans hutu. Eux-mêmes, en tout cas, estiment n'être ni Tutsi ni Hutu et ils ont tenté ces dernières années de se faire reconnaître comme une ethnie à part entière, méritant d'être reconnue dans le partage du pouvoir. Cette revendication est restée à ce jour lettre morte.
Le muryango (clan, lignage, famille). Le terme d'umuryango (pluriel : imiryango) recouvre trois réalités distinctes qui s'enchevêtrent.
D'une part, il désigne le " clan " patrilinéaire, distingué par un nom suggérant un ancêtre, une origine géographique ou une histoire (même légendaire) communs, mais sans cohérence territoriale particulière. D'autre part, il désigne la subdivision de ce clan en groupes familiaux plus réduits, qu'on pourrait appeler des lignages, où se conserve une vraie mémoire de la parenté, plus étayée que dans les clans. Enfin, il peut désigner la stricte famille nucléaire.
A l'intérieur de chaque ethnie (ubwoko), l'appartenance à l'un des quelques 200 imiryango répertoriés au Burundi pouvait conditionner, sous la royauté, l'accès aux fonctions politiques ou religieuses, et contenait les germes d'une ségrégation plus palpable encore que la distinction en termes ethniques.
Ce qui complique l'analyse de ces structures de la parenté est que les correspondances entre ubwoko (ethnie) et umuryango (clan) ne sont pas exclusives. Ainsi, il y a des clans définis dans un unique ubwoko : par exemple les Bajiji et les Bahanza sont toujours des Hutu, les Bakundo et les Bategwa sont forcément des Tutsi. Mais il existe aussi de nombreux clans trans-ethniques. Par exemple, les Barima ou les Baha peuvent être aussi bien des Tutsi que des Hutu, et il peut même s'agir de Twa. Ceci rend aléatoires ou erronées les correspondances systématiques entre clan et ethnie, et pose de vraies questions sur l'origine de toutes les catégorisations de la population burundaise.
Ajoutons qu'à l'intérieur même des ethnies pouvaient exister de fortes rivalités entre les groupes claniques. Un cas célèbre, dont on ne connaît pas bien tous les ressorts, concerne les Tutsi Hima, un groupe formé par une trentaine de miryango, vivant surtout dans le sud du pays. A l'époque monarchique, certains clans hima, comme les Bagara et les Basigi, exerçaient à la cour les fonctions rituelles de scarificateurs des taureaux, mais ils étaient méprisés par les autres groupes tutsi et le mwami ne pouvait contracter aucune alliance avec une de leurs femmes. Avec la République, ils ont au contraire accaparé le pouvoir et se seraient arrangés pour exclure des responsabilité les autres Tutsis, dits Banyaruguru (procès-purge des années 1970). Les trois présidents Micombero, Bagaza et Buyoya, dont les régimes couvrent les années 1966 à 2000, sont des Tutsi Hima.
Trois langues importantes coexistent au Burundi : le kirundi, le français et le kiswahili, à côté de nombreuses langues parlées par les minorités africaines (lingala, kikongo, kinyarwanda, wolof...), asiatiques (arabe, pakistanais) et occidentales (flamand, grec, italien...) résidant dans le pays. L'anglais fait aussi peu à peu son apparition, le Burundi appartenant depuis quelques années à l'East African Community. Il reste malgré tout peu usité, et l'on est loin du retournement spectaculaire entre francophonie et anglicisation qui s'est produit au Rwanda depuis une quinzaine d'années.
Le kirundi est la langue nationale du Burundi, parlée dans tout le pays par l'ensemble de la population, avec des variations régionales mineures. C'est la langue du quotidien familial, de la conversation courante et des relations commerciales sur toutes les collines de l'intérieur. C'est en kirundi qu'on écrit les pancartes commerciales ou publicitaires, les avis placardés dans les services publics, ou bien encore que l'on tranche les conflits devant les tribunaux. En revanche peu de textes officiels sont encore disponibles en kirundi, le français restant la langue de référence pour la législation. Ainsi, si les députés débattent à l'Assemblée en kirundi, les textes qu'ils produisent sont en général en français, ce qui ne facilite pas leur accessibilité pour la majorité des Burundais.
Le kirundi est une langue du groupe bantou, proche du kinyarwanda parlé au Rwanda. Les noms et les mots en kirundi sont souvent jugés imprononçables par les étrangers, mais en réalité, avec un peu d'entraînement, on peut parvenir à une lecture à peu près correcte. Malheureusement, il n'existe guère de moyens d'apprendre le kirundi en dehors de l'autoformation et de l'écoute (à Bujumbura, le Centre culturel français propose toutefois des cours hebdomadaires).
Le kirundi possède son vocabulaire propre mais il fonctionne aussi avec des emprunts aux langues étrangères. Par exemple, on peut trouver des héritages allemands dans les termes ishule (" l'école ") ou amahera (" l'argent ", qui vient de heller, une ancienne monnaie germanique), des mots français " kirundisés ", comme demokarasi pour parler de la démocratie, ou reta pour parler de l'Etat, des pouvoirs publics ou du gouvernement, ou encore des influences du swahili, dans l'usage fréquent des termes matata (problème), muzungu (le Blanc), bwana (monsieur), zamu (gardien), etc.
Le français (ikifaransa) est la deuxième langue officielle du pays, mais son usage est réduit par rapport au kirundi. A maints égards, on peut même se demander si le kiswahili n'est pas aujourd'hui plus utilisé que le français... Claude Frey, qui a rédigé il y a quelques années une étude sur l'usage et les formes lexicographiques du français au Burundi, avançait qu'environ 3 % de la population du pays était parfaitement bilingue, auxquels on peut encore ajouter environ 10 % de francophones plus occasionnels (Le français au Burundi, Lexicographie et culture, Edicef, Aupelf, 1996).
Le français est la langue de l'administration et des lois, parlée dans les occasions formelles ou protocolaires, ou lorsque des " Bazungu " francophones sont présents et que l'on souhaite leur faire partager la conversation. Il est assez bien maîtrisé à Bujumbura et dans les villes, moins sur les collines.
Introduit par les colonisateurs belges, le français du Burundi a gardé la marque de cette prime affiliation, puisqu'il est rempli de belgicismes qui peuvent étonner un Français de métropole. Par ailleurs, s'il est un peu moins pittoresque dans ses inventions lexicales que peut l'être le français parlé en Afrique de l'Ouest, il n'en demeure pas moins que certaines de ses expressions locales sont très imagées ou désopilantes.
Le kiswahili (ou swahili) a été introduit au Burundi à partir du XIXe siècle et il est dorénavant bien établi dans les villes, le long du littoral du lac Tanganyika et aux frontières avec la Tanzanie. Certaines cités populaires de Bujumbura sont entièrement swahilophones, comme Buyenzi ou Bwiza, et la plupart des quartiers correspondant aux anciens " centres extra-coutumiers " de la période coloniale le sont aussi (Rumonge, Nyanza-Lac, Gitega).
Les musulmans, les jeunes citadins et les étrangers pratiquent volontiers le swahili. Il est difficile de dire avec précision combien cette langue a de locuteurs dans le pays, mais on peut noter qu'après avoir été dépréciée sous la colonisation et après l'indépendance, elle a connu une progression notable ces dernières années. Elle reste toutefois disqualifiée par certaines couches de la population qui la considèrent comme trop marquée par la culture musulmane. Il s'agit en effet d'une langue afro-arabe, qui appartient au même groupe linguistique que le kirundi (bantou), mais avec une forte coloration arabe dans son vocabulaire.
Le kiswahili est la langue du commerce par excellence, une langue véhiculaire utilisée pour le négoce et la communication avec les pays d'Afrique orientale et l'est du Congo démocratique. Elle est utilisée par plusieurs dizaines de millions de locuteurs dans toute cette partie de l'Afrique, et a l'avantage d'être plus simple à pratiquer que le kirundi.
Le français du Burundi a longtemps été une langue châtiée, parfois même un brin empruntée. Même si les difficultés du pays ont fait reculer son apprentissage et le nombre de ses locuteurs (en ville notamment, où le kiswahili et l'anglais ont fait des progrès), le français reste au Burundi une langue de caractère, qui peut étonner parfois les ressortissants du pays de Molière. Il est en effet truffé de localismes et empli de belgicismes typiques. Il importe de reconnaître ces derniers.
Ainsi dans les maisons on va à " la toilette " (au singulier), on nettoie le sol avec un " torchon " (une serpillière), on doit parfois changer un " soquet " d'ampoule (une douille) et c'est sur une " sous-tasse " (et non une soucoupe) qu'on présente des " arachides " (cacahouètes) aux invités. Sur la route, après avoir suivi " l'écolage " (apprentissage de la conduite), on peut éventuellement emprunter un véhicule du " charroi " (parc automobile) de son entreprise ou de son ministère, en prenant garde toutefois aux accidents ou à la police " de roulage " (de la circulation). Dans le monde du travail en ville, on arrive au bureau dans " l'avant-midi " (en matinée), on se fait beaucoup " sonner " (téléphoner), on relie de préférence les feuilles volantes avec un " attache-tout " (un trombone) et on les classe dans des " fardes " plutôt que dans des chemises cartonnées (la chemise est réservée à l'habillement). Parvenu à l'âge de la " pension " (retraite), en espérant toucher " l'entièreté " (la totalité) de son traitement jusqu'à septante ou nonante ans (soixante-dix ou quatre-vingt-dix), on peut encore se reconvertir dans la politique ou la solidarité en demandant " l'agréation " (l'agrément) d'un parti ou d'une association... Du moment que l'on est suffisamment " castard " (en forme, costaud) pour " savoir " (pouvoir) le faire !
On trouve des mélanges fréquents dans les usages entre le kirundi et le français, des expressions traduites en français sur un calque du kirundi et qui ne sont pas à considérer comme des fautes, d'autres transformées de manière originale, ou encore des utilisations inhabituelles de certains adverbes :
" ego vraiment " est un oui très affirmatif.
" murafise chance " est utilisé pour dire " nous avons de la chance ".
" avec " est une préposition souvent accolée à des verbes pronominaux. Ainsi on " se connaît avec " quelqu'un ou l'on " est ensemble avec " des personnes.
" trop " est utilisé souvent pour " très ".
" moins " est utilisé pour " presque ". Par exemple " il est 9h moins " signifie qu'il est bientôt 9h.
Certaines habitudes sont aussi répandues, comme celle d'utiliser un nom propre de marque pour indiquer des objets génériques ou bien de créer des acronymes pour les titres, les statuts et les organismes officiels :
un Bic est utilisé pour tout stylo à bille
du Colgate, c'est n'importe quel dentifrice
du Nido désigne toute sorte de lait en poudre
le Bruban c'est le beurre (de la marque Blue Band)
le Mininter est le ministère de l'Intérieur, le Minéduc le ministère de l'Education, le Minefi celui des Finances... le meilleur pour la fin : la Régideso est la Régie des Eaux !
Finalement, il existe aussi des expressions typiques du français du Burundi ou du Congo voisin qu'on doit connaître pour ne pas tomber dans la confusion :
Au cabaret on ne verra pas de spectacles de magie ou de danseuses en petite tenue puisqu'il est au Burundi ce que le maquis est à l'Afrique occidentale, autrement dit un simple bistrot.
Un maquis quant à lui n'est donc pas un bistrot mais se réfère à l'absence de logement pour les étudiants.
Un karaoké n'est pas ce divertissement qui consiste à chanter en suivant des paroles sur un écran mais un concert joué dans un cabaret lors duquel les artistes reprennent des morceaux connus.
Une facture correspond à l'addition au restaurant.
Une main gauche est un véhicule avec volant à droite (en général, les voitures japonaises).
Le savon est un terme générique désignant indifféremment le savon de toilette, la lessive ou le liquide vaisselle.
Un essui est une serviette de bain.
Cogner ou être cogné, ce n'est pas battre ou être frappé, mais avoir un accident de voiture ou se faire renverser.
Le 2e bureau, c'est la maîtresse officielle d'un homme marié.
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